prophéties amphigouriques | Amarante

prophéties amphigouriques

@amarante kirchner & @alarius delpire

How far does the dark go ? Give me an omen, show me a sign. How far does the dark go ? Give me an answer, show me the light.

Mordoré diurne qui perce, s'immisce en colonnades étriquées par des vitres clauses et à la teinte brumeuse aux accumulations du temps écoulé sans réellement se soucier de leur transparence. L'astre décline, offrant panel bigarré sur la voûte qui finirait par s'éteindre peu à peu pour arborer sa nitescence sinistre bordée d'étoiles. L'oxygène s'est rafraîchi, marquant l'épiderme de sa morsure en chair de poule sur les avants bras à découverts dès la caresse du contraste extérieur tandis que le Fouineur vient d'ouvrir la fenêtre. En découle un réflexe immédiat de déplier soigneusement les manches de sa chemise avant de s'atteler à la lourde tâche de porter le bec de pipe aux babines pour en dérober les relents de nicotiane. Minois songeur qui s'égare dans quelques paréidolies évasives laissées par les cumulus orangés, les agrémentant de vapeur au tabac délicieux et sa fragrance qui saupoudre sa couenne.

Curieux loustic ne perçoit guère la carne famélique en approche errant sur le pavé en contre-bas, tandis qu'il trône du haut de la bicoque et ses combles surplombant le macrocosme. Vue imprenable sur les ruelles ensorcelées qu'il juge cependant moins avenantes que les artères parisiennes gorgées de poésies bohèmes et romantiques. Londres est pourtant devenue maternelle ouateuse en dépit du bourdonnement sinistre qui plane aussi bien chez les sorciers que moldus, davantage connue que les terres ancestrales.

Un sursaut marque l'échine tandis qu'un tintement frappe, ravalant aussitôt potentiel nœud truculent qui serait générateur de changement fâcheux à l'échine trop versatile. Hurluberlu inhale nouvelle bouffée en rehaussant sourcil, quittant son perchoir pour accueillir visiteur au sein de l'antre aussi curieux que chaotique. Les codex côtoient reliques et singularités, quelques drapés de morphologies hétéroclites s'amassent également sur un piano oublié depuis quelques semaines de par les bougonnements de voisins du dessous mécontents qu'il finirait de toute manière par ignorer d'ici quelques jours, comme à son habitude. Fouillis aussi ordonné que désordonné, suivant une logique que lui seul put saisir.  

Quelques marches mènent à la porte du cocon perché, descendues en quelques gestes vifs et dégingandés. Elle s'ouvrit sur minois familier qui provoque aussitôt la plongée d'une paluche au sein d'une poche pour en extraire une montre à gousset. Les mires vagabondent un instant entre les aiguilles et le faciès de sa convive, les dents maintenant toujours le bec de pipe aux lippes. « Je ne t’attendais pas si tôt. » Constat succinct face aux quatre minutes d'avance que l'allemande possède. Il lui ouvre cependant la voie, l'invitant à errer au sein de son cabinet de curiosités dont il semble faire partie intégrante.

Baguette à la boiserie claire trouve phalanges gauches comme extension, trace gestuelle muette en direction d'un vaisselier. Accio Théière. Avantages d’ensorcellements qui font reposer sur les lauriers et facilitent l'existence. Quelques tracés abstraits poursuivent dans les sortilèges informulés, font mouvoir quelques objets en ballet gracieux qui s'ordonnent à la perfection en donnant naissance à un service à thé bordé de quelques mignardises sucrées. Le museau invite l'autre à prendre place, optant à son tour pour un fauteuil vert bouteille qui a fini par se creuser sous la forme de sa carne qu'il épouse parfaitement à force de s'y tapir lors de lectures abstraites. « Et donc, parle-moi de ce songe. » Le timbre est avide, l’œil étincelant de fascination pour les talents de divination, paré à ruser. Une fois de plus.

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@amarante kirchner & @alarius delpire

Troisième œil, au centre la pupille, puits, promesse de néant. Viens, tombe dans le trou noir, que je te réduise en cendres.

Dans ce manoir aux briques brunes, dans ce salon aux effluves de belladone, la panthère grogne son mécontentement, elle marche contre les cloisons hébergeant les tableaux étonnés, la maîtresse s’apprête, levée de son lit de bonne heure, elle profite des quelques journées encore, de repos et d’activités nouvelles. Mais aujourd’hui, elle a rendez vous, Alarius lui a dis qu’il se trouverait chez lui, qu’il n’en partirait pas. Elle s’habille, fine grimace sur le minois, le temps d’habituer ses courbes à supporter la lourdeur du tissu, chaque couche sur ses épaules lui semble un poids démesuré. Elle ne possède ni de sac ni d’accessoires pour complaire à la jeune fille parfaite, d’ailleurs elle a les traits tirés de mauvais pressentiments et de rêves cauchemars qui l’éveillent toujours et la dépitent.
Politesse exacerbée, elle attend, patiemment, admirant les rosiers dans le jardin défigurés, à l’image de cet homme au faciès juvénile et aux yeux brillants de curiosité, l’Eden ouvre ses odeurs et découvre ses ferveurs, les chants des merles sur les branches, les couleurs d’or et d’ocre sur un ciel de velours d’azur, elle aperçoit des touches de nuages venant égayer un paysage impressionniste, son inspiration s’éveille, dans une énergie frustrée elle serre sa baguette. Elle envahira l’espace armée de ses toiles vierges et de ses pinceaux.  « J’ai l’impression, parfois, que tu ne me connais pas, Alarius. Je suis toujours ponctuelle. » Et elle embrasse la joue comme une amie, une vieille amie heureuse de trouver une présence connue et aimée. Le rire cristallin mêlé de grain de sable jaillit de sa gorge, elle souffle sur sa tasse, assise sur un fauteuil de velours usé et rapiécé.
Mais ses yeux voltigent, scrutent, s’égarent dans la pièce offerte à ses analyses, elle a toujours lié l’environnement des propriétaires comme une extension de leur inconscient, Alarius délivre sa folie, folie douce d’un être atypique dont elle rêve quelques fois, il apparaît nimbé de feu et d’ombre, le crépuscule d’une nuit aux éclats d’éther. Il a ce regard qu’il possède si doux mais si coriace et si têtu.  « J’ai rêvé que j’avais des jumeaux. » Comme une provocation sur son sourire à demi sur ses lèvres, elle ne peut s’empêcher de mentir… A demi aussi car ces deux enfants qu’elle admire, si éphémères et si fascinants, semblent vivants, si vivants qu’elle s’est mise à espérer, le coeur toujours battant à vision étoilée.  « Mais ce n’est qu’un fantasme de la part d’une femme qui n’a encore jamais eu l’occasion de donner la vie. » Le regret scintille dans les larmes qu’elle maquille, sa pupille gonflée de tristesse à la pensée qu’elle aurait pu… qu’elle n’a pas eu.

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How far does the dark go ? Give me an omen, show me a sign. How far does the dark go ? Give me an answer, show me the light.

Minois se renfrogne, dessine l'ébauche d'une esquive trop tardive qui se solde par friction d'épidermes qu'il avait fini un jour par honnir, alors que jadis sa carne voulut tenter de reproduire instinctivement tout ce qu'elle effleurait. En demeure naguère une amertume rance au fond de la gargue, comme si on pénétrait au sein de ses intimités et ses tripes lorsque les chairs se mêlaient pour un instant seulement. Môme à la forme trop inconstante, volatile, contraint de ravaler ses secrets sous les regards bienveillants d'aînés clairvoyants qui avaient vus juste en lui murmurant d'être discret. Très certainement digne revanche de la part d'Amarante pour une remarque acerbe évaporée dans un relent de vapeur de nicotiane. La bouderie s'évince, déjà oubliée au creux de leurs trônes respectifs.

Les lobes demeurent en alerte, capturent le moindre murmure qui s'écoule de l'océan de ses lèvres. De ceux qui préfèrent de loin écouter, comblant sans cesse les brèches d'inconnus au sein de ses dossiers. Quelques bouffées se perdent, cherchant naïvement à raccorder l'imagerie à quelques prédictions truculentes qu'il tente de deviner. Il y croit, Alarius, au talent ancestral, aux générations oubliées qui offrent leurs secrets bien gardés, trop bien placé pour le savoir. Et si lui vole les peaux, elle perçoit des parcelles d'avenir. L'irritation d'un déni flagrant qu'elle s'impose lui creuse le bide, ne cillant guère sous les quelques excuses abstraites qu'elle tente d'imposer. « Vraiment ? » Sourcil s'arque en tâchant de la sonder, bon physionomiste qui a fini par apprendre à décoder les expressions d'autrui pour mieux les reproduire, calquant les quelques tensions imperceptibles dans les traits, au même titre que de savoir parvenir à déceler d'une œillade s'il y a des vérités qu'on dissimule sous les lattes du plancher au creux des encéphales. De plus, il connaît la Kirchner et son panel d'expressions sur le bout des phalanges à force de s'être laissé porter dans une complicité qui semble surannée. La demi-lune farouche du vis-à-vis lui laisse une emprunte sceptique, les babines oubliant un instant leur pipe pour trouver l'ambre chaleureux de l'infusion.

« Et j'imagine que l'un des deux, buté, tentait de réfréner l'autre dans ses lubies de vouloir combler sa cécité face aux évidences, à vouloir démontrer qu'il était, lui aussi, particulier. » qu'il ricane, l'iris taquine lui offrant pointe provocatrice. Les mômichons oniriques se métamorphosant soudainement en leurs reflets respectifs et ses besoins coutumiers de lui décrocher les évidences aussi flagrante qu’appendice au milieu du front d'une licorne. Quand bien même ce n'est pas faute d'avoir tenté à de trop nombreuses reprises. Force, patience et persévérance. La carne s'enfonce un peu plus dans le velours émmeraude, les lippes enfournant à nouveau le bec de pipe. « Maintenant raconte moi ce que tu n'oses pas me dire. Je sais percevoir lorsque tu laisses échapper des boniments pour te jouer de moi. » La demi-lune demeure en courbure, quittant son regard pour plonger dans les quelques remous de sa tasse de thé. « Il pleuvra cette nuit. » Il se joue, s'amuse, en une provocation habile sertie d'une fausse innocence et sur un ton feintant la remarque anodine. La prédiction est bancale, erronée avec soin de manière à lui faire aussitôt corriger. Devin de pacotille qui ne parvient qu'à percevoir des banalités dans le fond de ses tasses. Pourtant, Curieux Loustic aime ça, tenter de saisir des étincelles d'avenir.  

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@amarante kirchner & @alarius delpire

Troisième œil, au centre la pupille, puits, promesse de néant. Viens, tombe dans le trou noir, que je te réduise en cendres.

Elle a glissé sur la pente de ses fantasmes quand elle parle de ces deux enfants jaillissant de son ventre qu’elle pense stérile, l’un a les boucles blondes et le regard franc, l’autre des cheveux lisses, le visage d’une poupée ; nés au même instant, un garçon et une fille, la lune et le soleil emmêlé, ils courent dans les couloirs du château, dans les jardins aux rosiers et cerisiers, dans les allées exotiques ils s’amusent mais écoutent leur mère. Elle songe et entend les cris de disputes, ces deux voix cristallines, pleines de leur jeunesse innocente, mais ils sont inexistants et n’existeront pas. Alors Amarante préfère secouer sa tête, nier, refouler, elle qui ne croit plus aux miracles depuis la mort de son frère et de son mari.  « Nous sommes déjà particuliers, la magie n’est pas connue de tous et sélectionne ses sorciers. Le don de troisième vue ce n’est pas quelque chose que je souhaite, j’associerai cela comme une malédiction. Et de ces prophéties, qu’en ferais-je ? Je n’ai même pas entraperçu la mort de mon feu mari ni celle de mon frère. » Le dernier mot de sa phrase chute dans un chuchotement, le ton dessine des trémolos de tristesse et de colère, la culpabilité danse entre ces deux sentiments, c’est une révolte interne qui se produit tout le temps qu’elle ose parler de ces deux figures, ils étaient la lumière qui cerclait ses ténèbres, l’apaisaient dans sa folie d’expériences et de tout cela, du jour au lendemain, elle mit un terme. Elle s’en veut, le remord gros, le regret puissant, elle perd son regard dans les rayures de la nappe, tentant inconsciemment de fuir ce deuil compliqué et alourdi.  « Au moins j’ai gardé un ami, il n’est pas mort… pour l’instant »
Elle plonge son regard dans celui de l’effroyable, celui de ce jeune homme qu’elle a côtoyé depuis des années, des dizaines, Alarius semblait cette colonne de granit, sous l’apparence de la gentillesse, une obstination. Et elle se mit à rire en se souvenant des réceptions données dans les vastes domaines des Kirchner ou des Delpire.  « J’étais particulièrement éprouvante à l’époque. Personne ne pouvait rien me dire sous coup de représailles. Comme quoi, la particularité n’est pas à chercher parmi toutes les étrangetés magiques. D’ailleurs, la voyance appartient aussi aux moldus… il me semble avoir entendu toute sorte de facéties et, pour m’amuser, j’ai payé une séance à une gitane… Ce ne fut pas concluant » Elle noie le sujet, éloigne les échos de douleur, parler de ses rêves qui l’emprisonnent, de ses moments d’absence, réveille ses résistances, de douce elle pourrait s’énerver comme Olympe qui, sagement allongée près d’elle, remue en cadence sa queue, la panthère surveille Alarius, qu’il n’aille trop loin dans ce sujet aux contours expressifs et dangereux.  « Tu peins ? J’ai découvert cette activité depuis peu, je ne peux plus m’en passer ! Je songe d’ailleurs à ouvrir une classe de peinture dans mon pensionnat… Les murs seront encore plus beaux. » Taquine, prête à jouer, à démontrer la fausseté de sa croyance, elle emprunte la tasse, joue de ses mimiques, concentrée.. Les résidus de thé dessinent des formes qu’elle ignore consciemment, une seule retient son intention.  « Tu es amoureux. » Comme une évidence.