once more with feelings (novembre 1898)

Injustice !
Le mot a tant et si bien été répété qu’il a presque perdu son sens initial. Ce qui ne l’a pas empêché de le beugler encore et encore tandis que la porte se refermait devant sa gueule. Scellée par un sort, elle ne s’ouvrirait plus que lorsqu’il aurait complété sa tâche.
Ils. Leur.

Les conditions, ont-ils dit, menaces, a-t-il entendu, ont été claires : soit il se pliait à la retenue, soit on le privait de Quidditch pour le reste de la saison. Si ça l’a convaincu, ça ne lui a pas fermé la gueule. Mais tout le monde sait, à Poudlard, que rien ni personne ne peut faire taire Kieran Goyle. À l’exception de très exactement trois personnes différentes, pour des raisons tout aussi diverses : Rylan Carrow, d’une moue enjôleuse, Minerva McGonagall, d’un regard lourd de reproches, et Susan Umbridge, parce qu’il se retrouve bien souvent trop occupé à essayer de lui faire fermer sa gueule à elle à coup de poings pour avoir le temps de discuter.
S’il est aujourd’hui injustement enfermé, c’est exactement parce qu’il avait tenté de lui faire comprendre qu’il fallait arrêter de le faire chier. Elle n’a pas compris, il n’a probablement pas bien compris ses arguments non plus, et soudainement ils manquaient la fin du match, défigurés dirait une certaine Skeeter, amochés au moins. Balais sous le bras, et sous le bras seulement parce qu’il était hors de question d’abîmer son précieux sur les traits ingrats d’Umbridge, ils ont été renvoyés dans les vestiaires puis directement auprès de leur directeur de maison respectif. Il n’a plus arrêté de grogner depuis, et a même redoublé d’efforts lorsqu’on lui a fait savoir que non, ce match-là ne serait pas réorganisé, tant pis pour lui, et tant pis pour l’équipe qui grognait maintenant de concert. Il se console tant bien que mal en se disant qu’ils avaient alors 10 points d’avance. Avant qu’il soit agressivement attaqué.

Cette retenue n’est pas sa première (clairement pas sa dernière non plus), ni même la première en sa compagnie. L’an dernier, il avait menacé le concierge de se retrouver avec un cadavre sur les bras s’il le laissait seul avec elle. Et n’avait donc pas vu la harpie l’attaquer par derrière, telle une lâche. Aux premières minutes de leur punition, ils en avaient récolté une seconde, se vautrant par terre sous les yeux d’un concierge courroucé. Bravo.
Aujourd’hui, il est donc plus attentif, bien que toujours outré par sa situation, et jette un coup d’oeil à sa partenaire pour la soirée, la bouche tordue en une moue de dégoût. Pour le travail à effectuer ou pour elle, qui sait. Sûrement les deux. Se dirigeant d’un pas lourd et en soupirant bruyamment jusqu’à l’une des tables, il attrape un chiffon humide du bout des doigts, se tourne pour le lancer à Susan. Espère qu’elle se le prendra en pleine face. “Grouille-toi, j’aimerais bien sortir d’ici avant minuit,” lâche-t-il de sa voix traînante. D’un geste, il désigne l’espace à nettoyer de fond en comble, avant de s’appuyer sur la table, les bras croisés.
Il n’est après tout pas le coupable de l’histoire.

@susan umbridge