endless battle (lekié)

L’information était venue d’un de ses contacts encore au ministère. Scoop dont Adetokunbo avait encore du mal à croire la véracité. Il pensait davantage à un bruit de couloir destiné à brouiller les pistes, à emmener leurs potentiels espions sur une fausse piste. Le sorcier avait gardé la bouche close, n’en parlant à personne, ni même à ses plus proches amis. C’était trop irréel. Parce qu’au-delà du fait qu’un potentiel membre de la famille Zabini pouvait être en vie, il y avait cet espoir. Espoir incontrôlable, interdit. Depuis des semaines, Adeto s’était dit qu’il était mort, emporté comme tout les autres. L’ancien gryffondor s’en voulait presque de se laisser envahir par ses propres sentiments alors que dans tout les cas, mort ou vif, le garçon, auquel il ne cessait de penser, demeurait toujours l’ennemi. Encore plus aujourd’hui. Encore plus, maintenant, que son père risquait dans sa vie dans une arène imaginée par un despote aux idées folles, par un malade qui voulait le monde entier dans le chaos. D’ailleurs, c’était là-bas que l’héritier des Shacklebolt se dirigeait. Il se sentait déjà mal alors que rien n’avait encore commencé. Il ne supportait pas d’imaginer le patriarche vivre dans des conditions aussi misérables. Il ne méritait pas ça. A la moindre occasion, il se le promettait, il le libérerait et il le vengerait de cet affront. Le mage était dans ses pensées, dans ses projets de revanche quand Adeto vit cette silhouette encapuchonnée. Etrange comportement pour une personne qui voulait rester discrète. A croire qu’iel se fichait d’être pris. Partisan ? Zabini ? Les deux ? Probablement. Il reconnut des visages familiers au loin mais, se contenta de se détourner pour suivre cet individu. Peut-être était-ce la réponse qu’il attendait. Adeto s’assura que personne ne le suivait pour une raison quelconque et s’aventura un peu plus dans les ruelles de Londres jusqu’au moment où prendre en filature quelqu’un ne l’intéressait plus, où le besoin de réponses devenait trop important. Aucun membre de la famille Zabini n’a survécu. Les mots résonnaient encore avec force quand la nouvelle était tombée. Pas un seul rescapé. Un massacre perpétré par des moldus. Le drame idéal pour s’engouffrer dans la brèche. Personne n’avait remis en doute cette atroce réalité. Il y avait ceux qui pleuraient, ceux qui criaient à la vengeance, ceux qui calomniaient le ministre de la magie de l’époque ainsi que sa famille parce que la rage n’avait aucune limite. Ils avaient tous bu ses paroles, même lui était tombé dans le panneau. « J’ignore si tu pensais passer inaperçu avec cet accoutrement mais, je dois t’annoncer que c’est complètement raté. » Ton calme alors qu’intérieurement, la tempête grondait. Jamais le membre de l’Ordre ne laissait ses émotions le trahir. Ce n’était qu’une porte ouverte à la manipulation. « Je comprends pourquoi tu fais ça. Quand on est censé être mort, c’est difficile de se balader dans les rues à la vue de tout le monde. » Surprise, il y a vraiment des espions dans votre camp. Son mystérieux interlocuteur n’avait pas fait un mouvement, ni un seul pas que le Shacklebolt se préparait à tout éventualité, baguette à la main et le regard fixé sur l’individu qui se décida à se retourner. Il ne se rappelait pas avoir déjà croisé un esprit depuis Poudlard. Cependant, à cet instant précis, l’ancien reporter avait l’impression d’être face à un de ces fantômes. Peut-être qu’il aurait été préférable que quelqu’un d’autre enquête, au final. Lekié était bien en vie, après tout.

endless battle.

flame you came to me, fire meet gasoline, i'm burning alive. i can barely breathe, when you're here loving me. --- @adetokunbo shacklebolt

La silhouette sombre faisait son ascension dans les rues de Londres qui commençaient doucement à être inondées du flot de sorciers qui se pressaient pour rejoindre l'arène. Aujourd'hui était un grand jour pour la Confédération de Grindelwald; il s'agissait du premier événement officiel de la saison, avec l'ouverture de l'Arène. Lekié avait été aux premières loges de sa préparation, oreille attentive aux récits enflammés de son jumeau. Cela faisait trois mois que le jeune homme percevait dans le regard de Nyongo cette lueur, cette rage de vivre qui le consumait littéralement de l'intérieur. En cette journée spéciale, les flammes qui flamboyaient presque dans les yeux du double enfant avaient terminé de convaincre Lekié; oui, il allait sortir et assister au spectacle. Car la famille le requérait. Sa famille le requérait; cette famille qui ne résidait plus qu'à présent dans les cœurs des deux seuls hommes Zabini.

Encapuchonné, bure de sorcier d'un noir de jais sur le dos, Lekié avait pris soin de se dissimuler un maximum. Certes, cet accoutrement ne passait pas inaperçu, mais au moins, il pouvait se targuer de semer le doute dans l'esprit des téméraires voyeurs qui oseraient poser le regard sur cette silhouette ténébreuse. Un doute valait mieux qu'une certitude, surtout lorsque votre objectif était de ne pas être reconnu.

Son ascension dans les rues de Londres se faisait en silence, le visage baissé, tâchant de ne regarder personne dans les yeux. Il se faufilait entre les badauds, la plèbe répugnante s'entassant, avide de sang, avide d'excitation, avide de voyeurisme. Le jeune sorcier ne savait qu'en penser. Il errait, ombre de lui-même, partagé entre le dégoût de se mélanger à la majorité de ces êtres inférieurs au sang mêlé, et le désir de vengeance qui brûlait en son cœur depuis la toute première étincelle qui avait endommagé le manoir Zabini. Qui méritait sa clémence ? Qui avait eu le courage de défendre l'honneur de sa famille ? Seul Grindelwald avait pris en mains les choses. Seul Grindelwald avait condamné ce crime odieux. Seul Grindelwald pouvait les faire payer, tous autant qu'ils étaient. Où était ce cher parrain de pacotille, protecteur de sa sœur cadette, cet Albus Dumbledore ? Où était Shacklebolt Père, cet insignifiant Ministre de la Magie qui fit honte à l'ensemble de la nation sorcière ? Où était Shacklebolt Fils, journaliste de son état, lui qui devait tant aimer les histoires à sensation ? Tous. Tous ceux-là ne méritaient plus sa considération. Il avait le cœur meurtri.

À mesure qu'il poursuivait son ascension en direction de l'Arène, le jeune homme eut la désagréable impression d'être épié. Son dos brûlait des regards insistants d'une silhouette située à plusieurs mètres derrière lui. Si Lekié jetait discrètement des coups d’œil par-dessus son épaule, le visage à moitié dissimulé dans son ample capuche de jais, il n'arrivait pas à percevoir distinctement son visage, tantôt le corps bousculé, tantôt la vue obstruée. L'allure, en revanche, la démarche, la peau sombre, la détermination... Lekié sentit une décharge électrique lui pincer le cœur; était-ce lui ?

Il accéléra le pas à travers la foule, sa bure de sorcier virevoltant au rythme effréné d'une ascension qui prenait l'allure d'une course-poursuite. Il bousculait la plèbe sans ménagement, soutirant des cris de sursaut, jusqu'à se dégager du flot de l'avenue centrale. Il s'engagea sur le trottoir, moins bondé, continuant sa fuite sans ralentir le pas, vers le silence du quartier. Il s'arrangeait pour se diriger à contre-sens de la foule, là où il finirait par ne plus y avoir âme qui vive. Accélérant encore davantage le pas, Lekié se mit à courir à un rythme encore plus soutenu, s'engouffrant dans la première ruelle qui s'offrait à lui, sur sa droite. Il longea les murs, parcourut différentes ruelles, tournant tantôt à droite, tantôt à gauche, vers les ténèbres. Il dévala une flopée d'escaliers en pierre; la ruelle dans laquelle il venait d'atterrir était sombre, à l'abri des regards indiscrets, silencieuse. Lekié se stoppa net au milieu de cette ruelle. Il pouvait sentir la présence de l'inconnu, quelques mètres derrière lui. Il percevait sa respiration sauvage, dansant à l'unisson avec la sienne, à bout de souffle.

— J’ignore si tu pensais passer inaperçu avec cet accoutrement mais, je dois t’annoncer que c’est complètement raté.

Le voile du doute se dissipa complètement; il s'agissait bien d'Adetokunbo. Ce chien de Shacklebolt.

— Je comprends pourquoi tu fais ça. Quand on est censé être mort, c’est difficile de se balader dans les rues à la vue de tout le monde.

Le culot outrancier de l'ironie était de très mauvais goût, particulièrement après une telle tragédie.

— Et moi je comprends ton étonnement suintant presque de déception. Il aurait été plus aisé d'oublier un mort plutôt que d'affronter son échec. N'est-ce pas ? Dit-il d'un ton calme, se retournant pour faire face à l'homme.

Lekié le toisa de son regard de jais, observant son allure, sa posture, ses muscles tendus. Zabini, lui, semblait détendu, d'un calme olympien déconcertant. En apparence seulement, car il pouvait sentir chaque goutte de son sang bouillir en lui.

— Et bien, qu'attends-tu, Shacklebolt ? Tu es venu terminer le travail que vos chers amis moldus ont commencé ? S'enquit-il, arquant un sourcil de curiosité, croisant les mains devant lui, comme pour montrer patte blanche. Je t'en prie, vas-y.

Vas-y, Shacklebolt, ose.

Des émotions contradictoires s’emparaient déjà de son être alors que l’information n’était pas complètement parvenue à son cerveau. Pourtant, il était bien là, en vie et les yeux habités par la rage. Adetokunbo se doutait que le calme apparent du Zabini n’était qu’une illusion, qu’un mirage. Intérieurement, il imaginait déjà la bataille qui se jouait. Entre eux, ce n’était que ça. Des conflits interminables, des sentiments qui agonisaient à force de ne pas pouvoir sortir et bien trop de rancœur. Deux âmes qui ne pouvaient s’ignorer alors que c’était probablement la meilleure chose à faire. Deux personnes qui pourraient s’allier pour le meilleur mais, qui préférait faire l’inverse à cause d’une trop grande fierté, à cause d’une erreur ayant mené la quasi-intégralité d’une famille à sa perte. Les badauds semblaient passer devant cette ruelle sans la voir ou peut-être, était-ce la tension palpable qui ne leur donnait pas envie d’emprunter ce chemin de peur de se prendre un sort malencontreux. Le ressentiment suintait des paroles de Lekié. Il savait qu’au moindre faux pas, la situation risquait d’être impossible à contrôler. Or, le but n’était pas de déclencher un combat au beau milieu du Londres Magique. Une tâche nécessitant toute son énergie l’attendait. Hors de question de se laisser envahir par la colère ou un quelconque sentiment négatif. Ce n’était pas l’objectif. « Parce que tu penses sincèrement que je suis venu jusqu’ici pour te tuer alors qu’il y a cinq minutes, j’ignorais que tu étais encore en vie ? » Non, il ne pensait pas. Lekié ne pensait à rien sur le moment, trop aveuglé par la haine, par la colère et par tout ce que représentait l’héritier des Shacklebolt. Toute logique lui échappait, toute raison avait probablement quitter son corps depuis l’instant où il avait survécu à toute cette horreur. C’était presque incroyable que son ancien amant ne lui ait pas encore jeté un maléfice. Peut-être qu’il était comme lui, peut-être qu’il avait une mission obscure confiée par leur nouveau ministre de la magie et qu’attirer l’attention ne faisait pas partie du plan. « Puis, contrairement à ce que tu peux imaginer, je ne suis pas idiot. Te tuer dans une ruelle sans aucun témoin servirait ton nouveau mentor… Tu serais un martyr et lui profiterait de ce nouveau drame pour mettre tous les torts sur un innocent afin d’attiser un peu plus la haine.» Hors de question d’être un pion dans le jeu sordide de ce malade qui se perdait dans sa propre ambition. Si Lekié voulait provoquer quelque chose, il allait devoir fournir un peu plus d’effort. Lui ne craquerait pas, ça ne ferait que le desservir, ainsi que l’organisation pour laquelle il avait juré allégeance. Contrairement à son ancien amant, Adetokunbo connaissait les enjeux de cette journée et il avait bien l’intention d’être présent au moment opportun, quitte à laisser en plan l’autre sorcier. Il avait eu l’info qu’il désirait, rien ne l’obligeait à rester dans le coin, à part un fantôme du passé qui s’incrustait régulièrement dans ses pensées depuis des mois. Une autre interrogation le taraudait, mystère qui venait s’ajouter à celui qui venait, à peine, de s’éclaircir. Était-ce le seul rescapé ? Le doute s’immisçait dans son esprit. Ça lui paraissait peu probable que ce soit le cas. « Pourquoi est ce que tu réapparais maintenant ? » Accusation masquée par une simple curiosité. Pourquoi est-ce que tu ne continues pas à jouer les fantômes en te foutant complètement de ce que les autres peuvent ressentir ? Au fond, tout aurait été bien plus simple si Adeto avait choisi de rentrer dans cette arène et de ne jamais poursuivre cette silhouette encapuchonnée.

endless battle.

flame you came to me, fire meet gasoline, i'm burning alive. i can barely breathe, when you're here loving me. --- @adetokunbo shacklebolt

Adetokunbo Shacklebolt. Un prénom et un nom de famille qui avaient signifié tant de choses; l'interdit, la passion, l'excitation et la découverte, et plus tard la déception, la haine et la rancœur. Un mélange d'émotions qui tourbillonnaient dans le cœur de Lekié, s'instillant tel un poison dans ses veines, se répandant à travers ses membres, s'installant dans chaque cellule qui composait son être. En cet instant précis, il ne savait que penser de l'homme qui se trouvait à présent face à lui. Il avait reporté l'amertume de douleur qu'il avait ressentie lors de l'attaque du manoir familial, avec la disparition des êtres qui lui étaient chers, sur le gouvernement Shacklebolt et tout ceux qui en portaient le nom ou la marque. Chacun des membres de la famille, chacun des officiels du Ministère, chacun des alliés d'Isaiah Shacklebolt; c'était contre eux que Lekié avait redirigé sa colère. Car même si le groupuscule anti-sorciers était objectivement responsable de ces meurtres, c'était, selon le jeune homme, la responsabilité de l'État magique de ne pas avoir empêché ce crime.

Bien que l'attitude de Lekié transpirait la provocation, il n'avait aucunement prévu de se lancer à l'aveuglette dans un duel. Pas aujourd'hui, pas maintenant, et surtout pas dans ces circonstances. Il n'avait pas joué des pieds et des mains avec son frère jumeau afin de se dissimuler pour tout garder aujourd'hui. Non, il était hors de question de céder à l'impulsivité. Le motto des Zabini prévalait; souffrir d'un calme noble et majestueux face à l'adversité.

— Je ne crois rien, Shacklebolt. Je ne fais que réagir à ce que j'observe en ce moment-même, déclara le jeune homme en montrant d'un geste calme la baguette magique qui s'érigeait entre les doigts d'Adetokunbo. Que comptes-tu faire de cela ? Dis-moi, pensais-tu que j'allais t'attaquer ? Ou alors souhaites-tu simplement m'entraver ?

Le Zabini marqua une pause, croisant finalement les mains derrière le dos, la capuche de jais couvrant toujours la moitié de son visage. Il paraissait calme, imperturbable, étrangement à l'aise.

— Oh, ou alors... s'exclama-t-il théâtralement, posant soudainement un index sur son menton, tu te sens particulièrement responsable de la situation dans laquelle j'ai été jeté, et la culpabilité étant trop dure à supporter, tu ne sais pas comment réagir ? Classique, pour quelqu'un qui ne sait pas gérer ses émotions. Le verbe était devenu tranchant, mais l'attitude de Lekié n'avait pas changé; il s'évertuait toujours à montrer une attitude calme, loin de toute menace physique.

La question que posa le fils du Ministre déchu piqua le cœur du jeune homme. Pourquoi ?, pensa-t-il. Et pourquoi pas ? La peur de représailles, le besoin de calme, le dégoût face aux regards de pitié lancés par la plèbe... tant de raisons qui expliquaient la disparition volontaire des jumeaux Zabini.

— Penses-tu qu'il m'ait été agréable de devoir jouer les fantômes ? Tu sembles bien au fait de ce que je devrais ressentir, apparemment. Alors, je t'en prie, éclaire ma lanterne, veux-tu ? Dis-moi, ô Toi, Votre Seigneurie, quelle aurait été la réaction appropriée à tes yeux ? Quelle était donc la réaction appropriée pour quelqu'un qui venait de perdre la quasi-totalité de sa famille proche, dans l'acte le plus vil qui soit, perpétré de surcroît par d'abjects sangs-de-bourbe ?