promises we made ☆☆ (gabrielle)

Promises we made

Le hibou prend son envol, la lettre entre ses serres. Destinée à terminer au milieu d'une pile, paperasse à trier parmi tant d'autre : une corvée ingrate dont sa chère sœur ne saurait s'acquitter, tâche déléguée aux bons soins de sa jeune assistante. Des mots marqués à l'encre, encre qui deviendrait cendre aussitôt lue.

Chez moi, dès que ma sœur te libère.
J'ai quelque chose à te montrer.
Nile.

Un stratagème disproportionné, mais l'occasion requérait une touche de flair que Nile était tout à fait heureux de délivrer. Consignes cryptiques à souhait, une lettre égarée, un accident de hiboux si, par malheur, elle tombait entre les mauvaises mains. Mais Gabrielle les comprendrait, ces quelques mots couchés sur le parchemin. Elle connaissait l'adresse.

Le son des battements d'aile s'éloigne et s'estompe, et l'attente commence. Avec elle, un pincement dans les entrailles. Il est nerveux, Nile. Depuis qu'il a rejoint les rangs d'Eabha, et qu'elle l'y a suivi, il se demandait si il aurait pû faire les choses différemment. Il avait jusqu'ici cru que le jeu en valait la chandelle, mais maintenant qu'une autre option s'était dévoilée, le risque qu'elle prenait au jour le jour lui paraissait de plus en plus insensé. Il aimerait rectifier le tir avant qu'Eabha réalise pleinement toute sa valeur, et qu'elle se mette à exiger des choses de sa part. Jusqu'ici, Gabrielle ne répondait qu'à lui, ses intérêts résidant prioritairement dans les faits et gestes de sa patronne, et bien qu'elle ait rejoint le fanclub de Morgane de son plein gré, l'idée qu'elle puisse se mettre davantage en danger pour son compte lui était pénible.

Eabha n'appréciera pas qu'on lui coupe ainsi l'herbe sous le pieds, pensa-t-il en faisant tourner son gallion au bout de son doigt, amusé malgré lui des potentielles retombées qu'une telle initiative pourrait engendrer. Il n'était pas engagé depuis suffisamment longtemps pour faire de telles vagues, mais ses priorités étaient restées les même. Encore fallait-il que ses plaintes soient entendues, et c'était plus ça qui l'inquiétait en l'instant. Pour il ne s'agissait pas d'ordonner mais bien de convaincre, une bataille loin d'être gagnée.

Puis l'attente s'éternise, et il ne saurait dire si c'est l'anticipation qui étire les minutes, ou l'inhabituel calme qui règne à Gringotts en cette belle journée de Juillet. Calme qui prompt Tariq à faire irruption dans son bureau, au beau milieu de l'après-midi. Calme maudit.

« Tu n'as pas daigné répondre à l'invitation concernant le dîner de ce soir, organisé par les Scamander. Pouvons-nous compter sur ta présence ? »

Ah oui, il se souvenait parfaitement de cette soirée. La lettre devait traîner quelque part sur son bureau.

« Oh non, père. Ça m'est complètement sorti de la tête ! » Les bras qui se jettent en l'air, gestuelle théâtrale tandis que son visage se fend d'une expression navrée. « Ça aurait été avec plaisir. Malheureusement, j'ai promis ma présence ailleurs. »

Les lèvres de son paternel se plissent, son regard froissé, sévère, sonde celui de son fils, enfantin.

« Je suis certain que personne ne t'en tiendra rigueur si tu repousses tes plans pour passer du temps avec des amis de la famille. »

Le vieux Shafiq n'était pas du genre à abandonner aussi aisément, mais Nile le connaissait trop bien pour savoir que sa proposition en apparence bénine n'avait rien d'anodine. Et puis, ce n'était pas la première fois qu'il le prenait en embuscade, l'entraînant dans diverses réunions de famille où, entre deux bieraubeurres, on lui vantait les mérites de leur petite organisation secrète.

« Impossible. » Le briseur de sort secoue sa tête vigoureusement. Tariq avait élevé plus têtu que lui. « Mais je t'en prie, transmet mes sympathies aux Scamander. » Il ponctue sa phrase du sourire qui le caractérise tant. Ce rictus arrogant.

Il avait atteint un point où il ignorait sincèrement si révéler son allégeance à Eabha de Brùn calmerait ces tentatives, ou empirerait les choses. Si son refus de prendre position malgré ses opinions pour le moins vocales l'irritait suffisamment, savoir qu'il avait fini par choisir un camp qui n'était pas le siens risquerait d'enrager le patriarche. Au-delà de ça, s'il était fier d'avoir pris position, on lui avait bien fait comprendre que l'existence d'un tel groupe ne devrait pas s'ébruiter pour le moment. Un parti-pris que le basané ne comprenait qu'à moitié, mais qu'il s’efforcerait de respecter, aussi tentant l'idée de se dresser contre l'oiseau lui apparaissait.

Heureusement, avec Gabrielle, il n'avait pas à tenir sa langue, et avoir quelqu'un de proche avec qui partager ses idées, ses convictions, avait été la bouffée d'oxygène qui lui manquait désespérément depuis qu'il était revenu à Londres. L'accueillir au sein de leur petite organisation l'avait insufflé d'une énergie féroce, d'une volonté de bâtir un monde meilleur, pour les sorciers qui, comme elle, souffraient d'un mauvais lancé de dés. Et ce soir, il lui montrerait en personne ce qu'ils étaient en train de construire.

promises we made.

it's strange what desire will make foolish people do
no one could save me but you
@nile shafiq

Le talon claque, empressé. Parquet qui s'écrase à chacun de ses pas plus impatients que le précédent. Le couloir qui sert d'issue aux archives parait long, sinueux, interminable. Ministère de la Magie, niveau deux, qu'elle a atteint en se ruant dans les escaliers. Ses bras bien croisés contre sa poitrine maintiennent un tas de documents, au moindre geste imprudent, tout s'éparpille sur la moquette qui camoufle désormais le bruit de ses chaussures. Elle y est habituée désormais, à courir dans tous les recoins du Ministère, à chercher un vieux avocat à qui il faut absolument donner ce document avant midi, une secrétaire qui doit à son tour faire signer des clauses à son patron, petit monde qui s'agite nerveusement pour quelques signatures qui vous condamnent. Ou non. Épée de Damoclès de l'administration. Tout tient à l'instant où la plume plaquera l'encre avec vivacité sur le parchemin, alors il n'y aura plus que ça. Ces quelques mots qui valent trop. Ainsi, elle arrive en trombe au bureau. Il y a d'abord Gilly, plus recroquevillée que jamais, elle cherche son bras blême tendu sous une étagère ce qui semble être son Rapeltout. Un grognement s'échappe, témoin de son bouillonnement. Les elfes n'ont jamais été reconnu pour leur délicatesse, Gilly n'est certainement pas l'exception qui confirme la règle.
« Je peux vous aider ? »
L'elfe de maison se relève et d'un coup sec, son crâne percute le bois de l'étagère. Un râle aiguise sa gorge presque enrouée. Elle se relève lentement, chacune de ses articulations se remettant de la douleur, et de l'humiliation. Saisissant la pile de paperasse des mains de Gabrielle, elle glisse à son tour ses doigts qui pianotent la moquette. Là, collée à sa paume, elle dégage la sphère et la fait jongler dans ses mains, victorieusement. Fierté qui ne vaut pas deux sous, qui ne dure pas bien longtemps, mais qui ramène un vent d'humanité dans la bâtisse lugubre.
« Même Jennie Quigley n'aurait pas autant réussi son coup. N'est-ce pas ? »
Son sourcil se arque, comme il est facile de se vanter de si peu. De quoi pourrait-elle autrement se pavaner ? Il n'y a plus que ça, des joies fragiles. Jouant toujours du Rapeltout, il finira par déraper de ses doigts peu agiles, et est renvoyé de plein fouet contre le bureau. Rebondit. Ploc. Ploc. Ploc. Soupir général, rictus nerveux, intimé au silence par l'ambiance oppressante des bureaux alentours. Gilly la ramasse finalement, et la dépose soigneusement entre deux portes-documents sur l'étagère.
« Madame Shafiq a eu un imprévu. Déposez le procès verbal, ici. Il y a du courrier à éplucher. »
De son index, elle pointe quelques parchemins fraîchement déposés par les hiboux. Certains en portent encore la marque de leurs griffes. A peine perceptibles si l'on n'y fait pas attention, mais dès lors qu'on est curieux on ne voit plus que ça. Ces quatre fines empreintes qui renfoncent à peine l'encre sur le papier. C'est tout mécaniquement que Gabrielle relâche ses recherches sur le bureau, et vient saisir la pile de lettres. A nouveau les bras en croix, chargée comme une mule. Et le travail s'ensuit, avec le même automatisme. C'est presque organique, plus d'intellect, que la chair qui s'anime, les prunelles qui parcourent les mots, et la main qui sépare inlassablement les tas de parchemins. Et comme une machine qui s'enraye, la main ne divise plus les piles, les pupilles s'immobilisent. Seuls les sourcils se froncent sous la surprise.

Citation :

Chez moi, dès que ma sœur te libère.
J'ai quelque chose à te montrer.

Nile.

Et le rictus surgit. Submerge son visage. Elle glisse d'un geste attendri la lettre dans la poche de sa longue jupe jaune. Réajuste son chemisier, comme si cela allait en conséquence calmer reprend le travail. A peine perturbée par l'annonce d'un tel rendez-vous. Masque de dentelle sur son faciès, trahi par l'impatience. Lorsque Gilly traverse le couloir, sa suspicion suffit pour qu'elle se concentre à nouveau. Les voilà, les trois tas de parchemins. Le plus urgent sur le bureau de madame Shafiq. Un placé dans les avant-bras de Gilly. L'autre dans le tiroir gauche de la commode en acacia. La porte s'ouvre brusquement, chevelure brune en cascade remuée par le mouvement, le regard clair de Genesis traverse la pièce alors que Gabrielle et Gilly finissent de remettre de l'ordre. Balance sa longue cape sur le porte-manteau, et déclare avant de s'enfermer dans son bureau:
« Gabrielle, vous pouvez disposer. »
Mauvaise journée ? Sûrement. Personne ne se risque à répondre, à toquer, à interroger. Toutes habituées à la cadence parfois lourde et tendue du Ministère. Gabrielle ramasse ses cheveux à l'aide d'une pince, et s'enveloppe à son tour de son pardessus. De sa main, elle salue l'elfe en silence, et s'esquisse du département de Justice Magique.

Poudre de cheminette, c'est dans les flammes vertes que sa silhouette s'engouffre et réapparaît là, d'un coup, d'un seul dans la demeure Shafiq. Elle s'invite timidement dans le séjour et toussote d'une manière bien préméditée pour attirer l'attention de son hôte.
« Je pensais que ce serait plus rapide par ici. Comment vas-tu ? »
,demanda-t-elle en l'approchant doucement. Etreinte éphémère, alors qu'elle le relâche, et se dévêtit de sa cape. Là aussi, tout se fait avec une familiarité étrange, elle ne connaît que trop bien cette maison, cet homme. A l'usure, des habitudes s'installent. Elle dépose délicatement son manteau sur le sofa, et ne peut réprimer son impatience. Mordille sa lèvre, et confesse.
« Alors... De quoi s'agit-il ? »
Délicieux mystère, boîte de Pandore qu'elle prend un malin plaisir à ouvrir.

Promises we made

@nile shafiq + @gabrielle petit

Bravant un dernier regard accusateur de la part de Tariq lorsqu'il s'éclipsa de son bureau après avoir négocié avec lui-même pour mettre fin à son service plus tôt qu'il n'aurait dû, Nile rejoignit son appartement au cœur de Westminster sans savoir si sa lettre avait trouvée sa destinataire. Son cabinet oriental l'accueillit, baigné d'or et de lumière, de blanc et de bronze, véritable musée où il entreposait toutes ses merveilles, babioles et autres trésors, tous sur le même pied d'égalité. Objets magiques, objets maudits, objets moldus saupoudrent les pièces qui s'enchaînent et qui ne servent qu'une utilité : celle de lui rappeler d'où il vient et d'où il revient. Des plantes du désert par-ci par-là, des chants venus d'Oman, des tableaux et des photos encadrées, animées, vivantes. Salim le regarde du haut de sa cheminée, un rictus bienveillant sur les lèvres. Cheminée qui, un peu plus tard, s'illumine dans un spectacle de couleur verte, lui délivre Gabrielle Petit, dont la vision allège son cœur. Son sourire illumine la pièce plus que le chandelier doré accrochés au plafond de son étude, et déjà ses bras l'accueillent.

« Tu as bien fait. » Si son initiative avait raccourci l'attente, elle méritait d'être félicitée. Et pour cause, il ne l'attendait pas de si tôt. Tant mieux.

Ses mains se risquent sur son dos lorsqu'elle s'invite dans une étreinte qui, aussi courte soit-elle, renforce ses convictions.

« Journée plus ou moins typique à la banque, répondit-il las en haussant les épaules. Des malédictions à briser, des gallions à compter, des gobelins à supporter. La routine quoi. Si tout ceci s'était réellement passé, le temps lui aurait sans doutes paru beaucoup moins long. Et toi ? Tu as entendu des choses intéressantes ? »

Déguisé sous forme de banalité, cette simple question portait un poids particulier, et Nile ne pouvait s'empêcher de redouter la réponse à chaque fois qu'elle franchissait la barrière de ses lèvres. Il redoutait le jour où elle lui avouerait avoir été découverte, naïf de penser qu'elle serait en mesure de lui annoncer en personne si un tel cas de mesure deviendrait réalité. Avec un peu de chance, c'était une des dernière fois qu'il lui posait la question dans ce contexte.

Il l'observe retirer son manteau et le poser sur le sofa avec aisance, note la lueur pétillante dans ses yeux excités, suppose son impatience. Ses mystères ont attisés sa curiosité, et un instant durant, il s’inquiète de ne pas rencontrer ses attentes. Sûrement ce qu'il s'apprêtait à lui dévoiler était loin de ce qu'elle imaginait. Mieux que ce qu'elle imaginait, osa-t-il espérer. Une lueur d'espoir, un plan mis en route, une idée qui grandit et qui prend de l'ampleur, une solution au chaos, les premières pierres constituant les fondations d'un monde meilleur.

« Je suis fort navré de devoir faire durer le suspense, mais l'objet de ma lettre n'est pas ici. Feignant l'embarras, il s'adonna à une ironique révérence, un petit sourire malicieux sur les lèvres. C'est un endroit, en fait. Je ne pouvais pas risquer de t'envoyer l'adresse. » ajouta-t-il, soudainement comme une confidence, en lui adressant un clin d’œil espiègle.

Morgane elle-même s'en serait retournée dans sa tombe pour le maudire, si un hibou aurait délivré sans pression la localisation du quartier général de ses partisans au ministère de la magie. Tout comme le cri du Phoenix était noyé par le tintement des gallions, Morgane se fondait dans les ombres, auréolée de mystère comme la forêt où elle a élue domicile, à l'abri des regards, à l'abri du danger.

« Alors enfile ta cape, ma jolie. D'un claquement de doigt, le blouson s'anime, virevolte dans l'air pour s'accrocher au bras de la belle blonde. Ce soir, c'est une toute nouvelle aventure qui débute. »

Il revêtit lui-même son propre couvert avant de tendre à Gabrielle son bras, l'invitant à le saisir. Il ne voulait pas se risquer à créer un portoloin vers le quartier général, qui n'était lui-même pas encore relié au réseau de cheminée, et si il n'aurait vu aucun inconvénient à virevolter entre les étoiles à ses côtés, on lui avait déconseillé le voyage par balais. Leur unique option pour le moment étant de transplaner jusqu'à destination.

« Accroche-toi bien surtout, la prévint-elle quand il sentit sa douche poigne lui enserrer la manche. Je ne voudrais pas que tu perdes une jambe, ou même un sourcil. »

Ce qui lui fait le plus de bien en cette année si difficile, c'est sûrement ces bras là, grands ouverts, d'un homme qui lui sourit, parce qu'il est content de la retrouver. Elle et personne d'autre. Un sang sans valeur, qui lui vaudrait de s'embourber dans une tombe injuste, mais lui, il ne voit qu'elle. Romantisme à deux balles, qu'elle se dit. Oui, c'est ça, il faut chasser c'te idée là parce que s'il lui arrive quoique ce soit. Elle veut pas le laisser de trace, aucune blessure, aucun coeur meurtri. Que le souvenir vague de son sourire qui rêvait encore. Elle ne pense plus à ça dès l'instant où ses doigts viennent délicatement s'aventurer dans son dos. Elle en sent la poigne discrète sur ses côtes qui en tressaillent silencieusement. Alors il lui raconte sa journée, quotidien qu'il semble porter comme un fardeau au dessus des reins. Etre qui se ratatine devant les autres, malgré force, ardeur, bravoure, il est aussi épuisé qu'Atlas par sa tâche qui paraît dans sa bouche si insensée. Il tourne un rond comme un rat en cage. Et le temps est à compter avant qu'il ne ronge sa prison de cristal. Oui, fortuné dans toute cette histoire. Shafiq, fierté d'un nom qui en jette, dont on en murmure les syllabes avec crainte et admiration. Il lui retourne la question. Mais plus d'enjeu, celle-ci. On lui demande des informations, arracheur de dents qui défend son camp, avant tout. Ce n'est pas bien méchant non, voire pas du tout, mais ce qui devait être son salut, profession qui la couvre et la protège est désormais à son tour source de frayeurs raisonnées. Elle se mord l'intérieur de la joue, et marmonne au rythme de ses sourcils qui se haussent avec lassitude:
« Non, pas vraiment. Rien d'essentiel, disons. »
Noyée dans la paperasse, journée qui se résume au secrétariat. Voilà. Rien de crucial, donc. Alors qu'elle s'installe, manteau dévêtu, et sourire qui brode ses lèvres. Curiosité héritée de Pandore, femme qui savoure trop facilement les secrets, en décèle et apprécie le mystère avec trop d'envie sûrement. Pendant un instant, Nile semble douter. Surprise n'est-elle peut-être pas si joyeuse. A son tour, elle l'observe d'un regard interrogateur, les prunelles qui miroitent d'une toute nouvelle inquiétude. Il la balaie de ses quelques mots et sa sarcastique soubrette. Elle pouffe, rire cristallin qui s'échappe dans l'écho du salon. Un lieu..? Cette nouvelle allure de chasse au trésor ne fait que titiller davantage son agitation. Elle lâche un presque imperceptible cri suraigu, alors que ses poings se renferment et que ses pommettes remontent au niveau de son visage. Elle remue ses poings près de sa poitrine. Et suit les consignes, en enfilant sa cape précipitamment qu'il a fait jaillir jusqu'à son bras. O magie, dont elle oublie parfois même l'utilité. Trop habituée à la modeste vie de moldu, peut-être. Ca la surprend toujours agréablement cette aisance qu'ont les Shafiq. Sans même se mouvoir d'un geste, Nile fait des miracles qu'elle aurait, elle toujours fini par métamorphoser en catastrophe. Maladresse ambulante. Elle place une main à sa hanche, l'autre en l'air, à la manière des vedettes de magasine. Et sourcil arqué, rictus aux commissures de sa lèvre, elle fanfaronne:
« Fin prête pour cette nouvelle aventure. Hum... Capitaine ?! », glousse-t-elle en plaçant index et majeur à sa tempe à l'instar d'un moussaillon obéissant.
Loin d'être aussi ordonnée, mais elle se plaît bien à cette relation qu'ils ont. Il lui fait découvrir beaucoup, aussi n'en savoure-t-elle que davantage son allégeance à Morgane. Fidélité qu'elle ne romprait pas. Envers Nile. Envers ses valeurs. Trop attachée à tout ça. A ses valeurs, bien sûr, oui. Il l'intime de s'accrocher à son bras, ce qu'elle fait sans la moindre timidité.
« De toute façon, si je finis défigurée, je fais de ta bouille d'ange de la bouillie pour Troll. Compris, capitaine ? »
Elle enserre sa poigne, finalement peut-être que cette surprise ne l'emballe pas tant que ça. Elle voudrait être rassurée, trop angoissée que cela en revienne aux épreuves abyssales qu'ils traversent ces derniers temps. Pour une fois, ne pas penser à cela. Se vider la tête. Avec quelqu'un avec qui elle doit tout, mais qui ne l'endette de rien.
« J'espère que ça en vaut le coup, Nile. Quitte à être pendue, mieux vaut que ce soit pour un dragon que pour un mouton. »
Le jeu en vaudra la chandelle, elle n'en doute pas tellement, Nile n'est pas imprudent, malgré son courage borné. Il l'a trop protégé pour lui faire encourir des risques inutiles, ça, elle en est convaincue. Mais le dire, ça lui dénoue un peu l'estomac. Elle renforce son emprise. Ses yeux clairs eux affrontent son interlocuteur, entre défiance et confiance, oui. Comme deux gosses qui se prennent à rêvasser ensemble d'une aventure réelle. Et pourtant... A la fin, tout sonne cruellement vrai.

Promises we made

@nile shafiq + @gabrielle petit

Impatience modérée tandis que le mystère grandit, son sourire voile les craintes qui murmurent sans pour autant l'empêcher de chérir le symbolisme du moment à venir : de bien des façons, ceci était un engagement qui risquait de les envoyer sur des chemins plus dangereux à mesure que la rébellion prendra de l'ampleur. Et rébellion il y aura, de ça, Nile en était certain. Une fois qu'il lui aura montré tous les enjeux, il ne pourrait y avoir de retour en arrière. En l'introduisant aux Enfants de Morgane, il avait fait d'elle un soldat, et les soldats en première ligne étaient les premiers à essuyer les coups. Le quartier général proposait une alternative qui ne lui était pas disponible quand elle était venue lui demander de l'aide, et lui donnait l'opportunité de rectifier ce qu'il considérait désormais comme une erreur. Il ne pourrait se le pardonner, si il lui arrivait quelque chose. Mais il passa ses griefs sous silence, forçant jovialité alors qu'il promettait monts et merveilles à sa jolie protégée. Revêtue de sa cape, il s'amuse du titre qu'elle lui attribue et de la menace taquine qui s'en suit.

« Bien reçu, affirme-t-il en lui adressant un clin d’œil joviale. Reste assurée, je m'en voudrais tellement de défigurer un visage aussi charmant que je n'oserais objecter à quelconque châtiment tu jugeras bon de m'infliger. »

Paroles tirées d'un registre qui leur sied bien, tendresse qui leur vient naturellement sans engendrer de questions qui risqueraient de gâcher l'amitié qu'ils cultivaient depuis des mois. Pourtant Nile éprouvait de plus en plus de difficulté à ignorer la sensation qui lui pinçait l'estomac à chaque fois qu'elle le bénissait de ce regard qu'il ne saurait décrire. Comme si elle le voyait différemment.

« Eh bien, ce que je m'apprête à te montrer n'est pas aussi impressionnant qu'un dragon -rien ne pourrait battre un dragon à ses yeux- mais je pense que tu seras satisfaite. »

Sur ces mots, il plaça sa main sur la sienne, tût la lumière d'un sortilège informulé, visualisa l'entrée de la bâtisse géante dressée dans l'ombre des pins, et disparut dans un tourbillon vide, entraînant la blonde à sa suite.Ils réapparurent dans l'obscurité de la vaste forêt que les lumières de Londres ne pouvaient plus atteindre. Derrière eux non loin, la demeure de leur bienfaiteurs atypiques et plus loin en avant, l'objet de tant de secrets.

« Tout va bien ? Toujours en un seul morceau ? » Il fit un pas en arrière, observa son binôme des pieds à la tête, osa effleurer son visage intact de son doigt basané, un large sourire sur les lèvres, avant de glisser sa main dans la sienne et de l'entraîner sur le sentier, inconscient des pensées qui pourraient traverser l'esprit de la jeune femme alors qu'il l'enfonçait dans les bois. « Suis-moi, ce n'est plus très loin. »

Sa confiance prise pour acquise, sa douce poigne lui intima de ne pas avoir peur. Rien ici ne saurait lui-même l'effrayer, et ce malgré les histoires que l'on racontait. Si ils n'avaient pas encore eu l'occasion d'explorer la forêt dans son intégralité, il savait que cette zone était sûre. Il aurait pû transplaner directement à l'intérieur de la bâtisse, mais il voulait que Gabrielle la voie comme lui l'avait vu la première fois, et puisse témoigner de son immensité avant d'y mettre les pieds.

« Et nous y voilà. » Géante parmi les arbres, phare montrant la voie aux navires égarés, lumière au bout du tunnel, la demeure se dresse fière. Rénovées les derniers mois par l'influx de nouveaux membres, elle accueillait désormais les exclus, les marginaux et les rejetés de cette société coincée dans le passé. « Bienvenue chez Morgane, Gabrielle. » Le nom résonne et son sourire s'étend, tandis que son bras attrape les épaules de la jeune femme. « Un lieu de paix, de repos, où les nés-moldus et les hybrides peuvent se sentir en sécurité, grâce aux Lovegood. C'est ici que les choses vont enfin bouger ! » Et naturellement, sa main se glisse de nouveau dans la sienne. « Je te fais visiter ? »