socks & pockets - alarius

Il y a quelque chose d’inquiétant dans le fond de l’air, ce soir. Lorena le sent – peut-être parce qu’elle sent toujours quelque chose d’inquiétant quelque part - , et sent son estomac se nouer alors qu’elle suit le balancement lancinant des jambes d’Alarius et qu’elle entend les feuilles crisser sous ses pas. Un œil acéré voit l’orée de la forêt obscure, au loin, au travers de la boutonnière de son ami, et tente de scruter le moindre signe de vie. Rien. Déçu, le rongeur reporte son attention sur le gros titre de la gazette du sorcier : les nouvelles ne sont pas bonnes, et ça ne rend pas son humeur meilleure. Roulée en boule, l’animagus ferme les yeux en attendant des informations supplémentaires sur la piste que son compère et elle suivent, et finit par piquer du nez dans son mouchoir, bercée par sa marche régulière. La nuit dernière a été longue, et elle le sent; mais les souvenirs de recherches jusque tard dans la soirée s'effacent petit à petit au profit du grand trou noir du sommeil.

Le rongeur se réveille, secoué par ce qu'il interprète comme un pas de travers, et s'agite dans son nid improvisé pour se dégourdir les pattes, avant de jeter un oeil à l'extérieur: la nuit est à présent bien tombée, et leur travail commence. De son mordillement habituel, Lorena signale à son ami qu'il est temps de la faire sortir et qu'elle souhaite prendre l'air (possiblement sur son épaule droite, mais il s'agit là d'une nuance que des dents de cochon d'inde ne peuvent transmettre avec finesse). Plus globalement, elle a besoin d'estimer le terrain pour se rendre un peu utile. Si ses jambes sont un peu courtes pour une randonnée nocturne, son odorat sous cette forme est suffisamment développé pour suivre une piste, aussi ténue soit-elle.

"Squee."

Elle couine alors que le métamorphomage la dépose à l'air libre, plus pour s'excuser d'avoir accidentellement troué la victime de ce soir que par réel inconfort, et agite frénétiquement ses pattes arrière pour se débarrasser de la chaussette accrochée à ses griffes et qui pendouille mollement, avant de la renifler avec application. J'espère que c'est une chaussette propre, songe t'elle en tentant de retrouver l'odeur dans les parages. Mais rien. Le cochon d'inde affiche un air boudeur, et couine à nouveau de contrariété.

Un gnome voleur de chaussettes, ça devait laisser une sacrée odeur, pourtant, non? Elle n'est pas spécialiste des créatures magiques - c'est plutôt Henry qui était calé dans le domaine - mais elle en sait assez pour savoir que l'hygiène n'est pas toujours leur qualité première. Alors, pourquoi ne sent-elle rien? Mentalement, elle liste les théories qui lui viennent.

1) Le gnome s'est lavé pour ne pas salir les chaussettes qu'il vole. Effort Exceptionnel.
2) Il s'agit d'une sous-espèce de gnome autonettoyante pas encore découverte par le monde magique. Passable.
3) Ils ont utilisé une potion. Laquelle, elle n'en sait rien, pourquoi, elle n'en sait rien non plus, mais la plupart des bricoles du monde magique peut être réglée par une histoire de potion. Acceptable.
4) Il s'agit d'un réseau organisé de gnomes espions aux buts nébuleux mais probablement mauvais qui s'est enchanté pour ne pas laisser de traces dans le monde sorcier, sous la tutelle d'une créature bien plus grosse et bien plus intelligente qu'eux. Les chaussettes ne sont qu'un début - bientôt, ils passeront à la conquête du monde. Peut-être même que Grindelwald est dans le coup. Optimal. Ou Troll. A débattre.
5) Elle est située un peu trop haut pour sentir les odeurs au sol. Pas de notation.

Satisfaite de cet effort intellectuel qui ne l'a pourtant pas avancée d'une semelle dans la recherche de l'infâme voleur, elle envoie un petit coup de tête doux dans la direction générale d'Alarius, soucieuse d'entendre ses hypothèses avant de procéder à la partie pratique de l'enquête.

Une seule certitude: avec deux esprits brillants comme le leur, le coupable ne pourra pas de cacher bien longtemps.

Ça, ou ils vont tous mourir dans d'atroces souffrances.