pain is beauty (antalina)

Etait ce volontaire, ce souhait d’accumuler les heures supplémentaires, les séances d’entrainement au ministère ? Selina ne voulait pas reconnaître qu’elle fuyait quelque chose. Peut être parce qu’elle était incapable de mettre le doigt sur ce que pouvait bien être ce ressenti. Souvent agacée par ce sentiment d’incomplétude qui ne s’épanchait plus contre d’autres corps, encore moins en échangeant avec Kieran dont les problèmes semblaient si futiles comparé à tout ce qu’elle devait gérer dans son département. Promotion ou malédiction, lorsqu’elle voyait l’incompétence de certains hommes du bureau des aurors, elle pouvait se poser légitimement la question. Mais, opiniâtre, la jeune femme ne baissait pas les bras et continuait à chercher une issue aux enquêtes en cours, quitte à n’avoir qu’un sommeil en demi teinte. Les lumières qui se meurent dans sa pièce réservée, et elle quitte déjà le bureau pour retrouver un homme, pour une fois qui ne partagera jamais ses draps.

Antarès Black était un jeune homme tout à fait singulier. Aux élans souvent dévastateurs, il restait toutefois un élément incontestablement efficace. Et Selina l’appréciait surtout pour cela. La noirceur des âmes n’avait d’intérêt que si elle portait à un dessein plus grand que l’unique torture physique ou psychique. Et si elle savait pertinemment que le Black appréciait les coulées de sang, il servait la cause avec une envie indéfectible de bien faire. Un brin trop fougueux, Lina était certaine que cela pourrait se gérer avec quelques exercices qui canaliserait l’énergie débordante du garçon. Pourtant, il a raté une séance. Puis deux. En jurant dans une lettre de lui expliquer la raison.

“Merci de m’offrir le privilège de ta présence, Black !” Il était déjà dans la salle d'entraînement, et quand Selina vit le visage du garçon, elle comprit : il n’était pas parti batifoler avec sa fiancée, oh non, il s’était fait ravager la gueule. Bravo, Black, dans quels draps t’es tu encore fourré ? “Antarès, mais qu’est ce qui s’est passé, par Merlin ?” Elle lève les yeux au ciel posant ses doigts sur le visage encore tuméfié du garçon. Etait-elle si mauvaise professeur pour qu’il se retrouve si abimé ? “Moi qui pensait que tu passais ton temps sous la jupe d’Astoria, je me suis bien trompée, qui t’as fais ça ?” Elle s’arrête un instant, et reprend, l’air sévère. “Non, en fait, tu sais quoi, je me fous de qui t’as fait ça, je te préparerais pour que tu te venges en conséquence, ce qui m'intéresse c’est comment tu t’es retrouvé à te faire taper dessus sans pouvoir te défendre ?” Parce qu’au vu de son état, la personne en face de lui n’avait surement pas grand chose. Un soupir agacé quand elle l’examine sous toutes les coutures.

“Tu me racontes, et on s’y met, on a beaucoup de travail, on dirait...” Elle ne se change pas, Selina, elle s'entraîne toujours en jupe ou en robe, parce qu’elle sera dans ces conditions si jamais on l’attaque, pas de tenues de combats pour les femmes, et lorsqu’on souhaitait se faire une place dans ce monde masculin, il fallait s’accomoder des toilettes serrées et volatiles tout en restant efficace. C’était à ses yeux ce qui prouvait qu’une femme savait être meilleure combattante qu’un homme, car rien n’était fait pour leur simplifier la vie.

Gamin qui était tombé, il avait galéré à se relever, redresser la tête, quitter cette chambre d’hôpital miteuse pour retourner dans le grand monde, le monde de tous les dangers. Il n’allait pas mieux, bien loin de là, le cerveau qui marchait a deux cents à l’heure sans jamais se reposer. Les idées qui se succédaient, les envies de vengeance, de gueuler le nom du bourreau, secret pourtant gardé, parce qu’il n’avait aucune preuve pour l’instant. Il marchait calmement, les couloirs du ministère se déroulaient devant le langue-de-plomb. Evidemment on lui avait dit de prendre quelques jours, quelques semaines, mais un Black ne se cache pas, non, ils avaient été trés clair, il allait retrourner dans le monde le plus tôt possible, parce que Arcturus était déjà hors course, et qu’il fallait bien montrer à ces gueux qu’on ne blesse pas un Black, qu’il se relève toujours, que la meute reste puissante. Mon cul…

La main gauche vient alors libérer des lippes agacées une cigarette allumée, crachant quelques volutes de fumée, le visage fermé du gamin faisait peur a voir, encore marqué par les cernes, il puait la fatigue et la faiblesse. Sa main droite elle était fourrée dans sa cape, les doigts crispés sur le manche de la baguette, instinctivement, sans trop le savoir. Ses yeux eux, balayaient la foule, scrutaient les visages, on l’évitait quand il avançait, évidemment la nouvelle avait probablement déjà traversé Londres. Il levait les yeux vers la porte du département des mystères, sa main venant se poser sur le bois ancien, un frisson qui courait de ses dextres à sa nuque. Elle, au détour d’un couloir, une silhouette qu’il croyait reconnaître, le sang qui se glâce et la baguette qui surgit, éclairant le visage d’une parfaite inconnue qui se confonds en excuse. Le myocarde se relance, mais le gamin tremble, faisant déguerpir l’intrue. Il s’appuie sur un mur, se rappelle des mots de Naiara, calme le cœur qui s’emballe en finissant la cigarette à la va-vite, une potion ouverte qui vient calmer un peu l’esprit encore trop à vif.

La mâchoire se serrait, le visage de l’agresseur encore marqué sur ses pupilles, il s’efforçait de ne pas regarder la foule, comme un Black après tout, et pourtant chaque visage féminin était épié, persuadé qu’elle allait le retrouver, finir le travail, pourquoi ne l’avait-elle pas fini après tout ? Elle en avait eu l’occasion, et lui avait été suffisamment faible pour se laisser approcher. Le Bureau des Aurors se dessinait finalement face à ses pupilles, les visages des différents Aurors se tournaient sur une silhouette habituelle, le Langue-De-Plomb n’avait de cesse de venir dans le service de son parrain, posant ses serres avides de sang sur quelques dossiers de né-moldus recherchés, après tout, on ne refusait jamais quelques gallions contre du sang-versé. Il arrivait finalement, les doigts se glissant sur la poignée de la porte, l’ouvrant manuellement pour une fois, magie instable depuis ce jour là, capable de détruire le pan entier du mur en voulant ouvrir. Il serre les dents et pose son regard sur Selina.  “Merci de m’offrir le privilège de ta présence, Black !” finalement la nouvelle n’avait peut-être pas voyagé...tant mieux. ”Toi aussi tu m’as manqué Parkinson” La voix était légère, pourtant elle n’avait pas l’entrain et la fougue de leurs entraînements habituels, ces entraînements censés préparer Antarès et canaliser ses colères, inutiles quand il en avait eu besoin. Pourtant il avait besoin d’elle pour garder la tête froide, besoin de souffrir pour aller mieux, stupide, logique que pour ceux comme eux qui se baignaient de plaisir dans les souffrances, qui comprenait le monde en faisant couler le sang. “Antarès, mais qu’est ce qui s’est passé, par Merlin ?” Il grimace, la main qui vient chasser celle qui se pose sur le visage, pas encore prêt à toucher, tremblant même quand Astoria venait poser sa main sur la carne fragile. La main qui passe dans les boucles coupées. “Non, en fait, tu sais quoi, je me fous de qui t’as fait ça, je te préparerais pour que tu te venges en conséquence, ce qui m'intéresse c’est comment tu t’es retrouvé à te faire taper dessus sans pouvoir te défendre ?” Il lâche un sourire léger, le Black égal à lui même, rarement du genre à dévoiler des sentiments par milliers, il se contente de hausser les épaules, retirant sa veste et retroussant les manches de sa chemise. ”J’aurai préféré être dans les jupes d’Astoria crois-moi.” Pourtant il remarque que cette fois, son humour douteux ne le sauverait pas de quelques explications dues à la tutrice, il levait les yeux au ciel ”J’avais bu, beaucoup. Elle en a profité, fin de l’histoire. Ceci dit elle était pas dégueulasse à regarder donc ça aurait pu être pire pas vrai ?” Un sourire carnassier viens tendre les lèvres un peu sèches, à son habitude jouant des mots pour cacher ce qui ne va pas, pour laisser s’échapper quelques bribes de l’histoires. ”Elle ne m’a pas trop abimé je te rassures, j’lui ai dit de faire attention au visage je sais à quel point tu ne peux pas t’en passer” Il faisait le fier, l'intouchable, l'immortel. Le dieu qui ne pouvait être touché par les affaires des mortels. Pourtant il retenait les tremblements, retenait la voix qui cherchait à se casser. Gardant pour lui la honte et l’humiliation subie, l’étendue des dégâts, le tatouage sur le torse caché par la chemise. Sourire qui venait couvrir les blessures, quand bien même elle verrait derrière les non-dits, ils avaient tous deux été élevés à la même ancienne, cacher les défaites, ne jamais avouer ses faiblesses et ses failles. Pourtant, un dernier point à éclaircir. ”Peut-être que tu pourras m’aider avec ça...” Il tends la main vers une des bougies qui éclaire la salle, soufflant pour éteindre la flamme, il prends l’objet entre ses doigts, allumer une putain de bougie sans sa baguette était devenu une habitude, pourtant cette fois, quelques étincelles puis plus rien, la magie encore bridée, cachée. ”Pas capable d’allumer une putain de bougie” ça sort presque tout seul alors que la cire se déforme entre ses doigts, le sang qui chauffe, et finalement toutes les bougies qui brûlent plus fort.