talk some sense to me (adeto)

Croissant de lune qui s'arrondit chaque jour davantage. Dans les tripes que ça se tord, à dégueuler la pénombre toujours un peu plus férocement dans les veines, opacifier l'entre-tempes de ce brouillard et l'empêcher d'y voir clair. Déjà peu adroit pour démêler le tumulte que la Rosier a engouffré sous ses côtes en lui envoyant un faire-part de mariage, c'est une obscurité de plus en plus compacte qui l'encourage à sombrer. Sans doute serait-ce plus aisé de laisser la part belle au chaos qui ronge sa raison, céder du terrain au monstre et cesser de tâcher de contrôler l'indomptable. Le gosier encore plein de ces potions confectionnées avec soin par les deux sorcières contraintes au secret, il sent pourtant la fébrilité le gagner. Et ça se perd en mugissements assourdis par quelque sortilège entre les murs de son appartement. De ceux qu'il entend résonner, à se demander si ces grondements lui appartiennent vraiment, rejetés à grandes expirations en espérant amenuiser le poids plombant ses bronches. Plus animal qu'homme quand la colère résonne, à faire déguerpir le fléreur d'entre ses jambes, se planquer les elfes de maison. Personne dans les parages quand Malfoy s'enrage, écume aux lippes de vociférer dans le vide, attifer la Rosier de tous les maux de son monde. Et abattre les poings, renverser les chaises, les tables, force innommable ne contribuant qu'à enfler le désarroi, horreur en fond d'iris contemplant le désastre dans un soupçon de clairvoyance.

Et puis, l'eau brûlante sur ses muscles endoloris de tension accumulée. La vapeur dans laquelle il disparaît, pour n'en ressortir que parfaitement apprêté. De ces pantalons de costume hors de prix revêtu fièrement, assorti d'une chemise immaculée, reflets dorés se promenant de manière disciplinée sur son front et puis, sourire enjôleur forcé aux lippes. Apparences trompeuses, sans doute l'ont-elles toujours été, un peu. Jamais tant que depuis quelques mois. Qu'aujourd'hui. Proche du point de rupture, ne tient pourtant guère à annuler la sortie prévue sur un coup de tête en la compagnie de son ami de toujours. Prêt à s'enfoncer dans l'allée des embrumes, emprunter les ruelles les plus secrètes et s'enfoncer dans l'une de ces nouvelles tavernes dont le nom ne se donne qu'à cercle fermé. Un peu téméraire que de ravaler le cataclysme qu'il porte en son sein en feignant que tout se déroulera bien. Mais rien ne se passe jamais réellement comme prévu, avec Adeto. Peut-être la première excuse sur laquelle il se jette, en l'emportant avec lui sans rien admettre de son état d'agitation. Peu raisonnable, Malfoy, pas plus que lorsqu'ils n'étaient qu'adolescents. Besoin de le voir, lui, tout ce qu'il sait, tout ce pour quoi il oeuvre dans un égoïsme flagrant. Comme ça qu'il l'y retrouve, murmure un mot de passe pour contempler la torsion du pavé devant leurs pieds, l'escalier en colimaçon qui s'y creuse, totalement enchanté.

Il y eu un verre, puis deux. La certitude de ne pas être tombé en zone d'accalmie, et se satisfaire du désordre ambiant. Plus aisé d'oublier la colère rongeant ses os quand autour, ça parle fort, ça danse en vagues agitées sans que l'on ne pense à le remarquer. Il y en a bien un pourtant, qui se trouve trop proche pour ne rien en cerner. « Je t'inviterais bien à danser, mais je doute que l'on passe inaperçu. » Ce qu'il clame à l'attention d'Adeto, accoudé au comptoir, en levant son pichet dans sa direction. Là, qu'on le bouscule, suffisamment fort pour que le breuvage s'agite en envoyant quelques rares éclaboussures dans les airs. Se rattrape comme il le peut, Laserian, à manquer de percuter Adeto, finir par se stabiliser en s'agrippant à son siège.
Sans doute pourrait-il en rire.
Comme d'habitude.
Lancer une remarque cinglante au maladroit et relativiser le tout après l'avoir salement mouché.

Mais rien n'est habituel. Pas quand, dans un sursaut, c'est la bête qui rugit sous ses côtes, urgence se saisissant d'abord de ses yeux assombris, de ses traits défigurés par la colère, et puis, de ses gestes, aussi. Comme ça qu'après un dernier regard échangé avec Adeto, à tenter de s'y arrimer pour ne pas se perdre, c'est tout son corps qui pivote. Et le pichet qui vient s'éclater sur le crâne de l'individu, déjà en train de s'excuser de mots balbutiants et d'une main posée sur l'épaule du lycan.