« Tu n'es pas attentif, Scamander. » Hm ?
Il lève la tête, plisse les yeux et remarque qu'il est toujours au ministère, devant son formateur, l'auror Scrimgeour qui lui explique le rapport qu'il doit lui fournir d'ici deux jours. Il cligne des yeux à plusieurs reprises pour revenir à la réalité.
« Pardon. Vous disiez ? »
La remontrance est sévère, sans doute injuste car l'homme n'aime pas se répéter, mais il n'est ps aveugle. L'esprit est attentif et l'auror a remarqué sans difficulté que son élève était distrait depuis quelques jours, absent de son travail, le regard perdu dans le vague et pourtant, ce n'est pas le genre de la maison.
Non.
Theseus est sérieux, perfectionniste et carriériste.
Il ne fait pas cela volontairement et ne tenterait jamais quoique ce soit qui pourrait mettre en péril son avenir au sein du bureau des aurors. Et pourtant, c'est plus fort que lui. C'est là, un noeud qui le serre de plus en plus, à l'intérieur de son être, l'empêche de trouver le sommeil, quiétude volée, concentration dérobée et colère sourde qui prend lentement le contrôle de la personnalité, change le renard en esprit vengeur.
Ils ont osé.Oui. Ils ont osé s'en prendre à sa mère, sang de son sang, celle qui lui a donné la vie, reine de la tanière. Ils ont osé. Et cela, le rouquin ne peut pas l'accepter. Les détails, il les ignore encore. Tout ce qu'il sait, c'est que sa mère a été torturée physiquement pour qu'on lui arrache des informations, que sa main sera à tout jamais le rappel de cet horrible endroit et que sa voix s'est éteinte en même temps que la vie.
Car oui, si Artemisia est encore en vie, quelque chose en elle s'en est allée. Theseus le sait, le ressent. Ainsi, il ne tient pour une fois pas compte des menaces sévères de son formateur sur son manque de rigueur, il se contente de l'écouter et d'acquiescer sans un mot.
Que cela ne se reproduise plus ! Il ne dit mot, il consent et la porte claque.
Theseus pourtant, reste de longues minutes adossé à la porte, le regard vide, les yeux perdus dans la contemplation de ses mains.
Les siennes sont intactes. Et l'envie de cogner les murs le prend, soudainement, sans qu'il ne puisse contrôler cela car depuis qu'il sait ce que sa mère a subi,
sans en connaître les détails et cela le ronge de l'intérieur, l'esprit de la vengeance s'est emparé de lui. Quelques pas, son petit bureau qu'il partage avec deux autres aurors en formation, absents, la porte se ferme, le verrou aussi et Theseus lâche sa haine, crache sa colère.
Ca tambourine dans le mur à plusieurs reprises, ça martèle l'impuissance de ne rien avoir pu faire, jusqu'à ce que le mur se tâche de sang, jusqu'à ce que les os menacent de se briser, il arrête enfin, les jointures malmenées, la peau écorchée et le front posée sur le mur. Les cheveux roux d'ordinaire plaqués sur son crâne, coiffeur droite et trop parfaite sont en bataille.
Le lion rugit, le renard se meurt et l'écosse pleure.Plus tard, la Tanière est silencieuse.
La nature est le seul écho qui trouble le bruit du silence, en dehors des cris des nobles hippogriffes. Theseus baisse les yeux sur ses mains, des gants qu'il a décidé de porter en cuir marron clair pour masquer son coup de sang quelques heures auparavant.
Je ne veux pas l’inquiétude, non, je ne le veux pas se répète le jeune homme tandis qu'il cherche du regard sa mère. Ni dans la demeure, ni ailleurs, elle est pourtant là, à observer les créatures, silencieuse comme elle l'est depuis son retour.
Les pas du fils se font entendre et le voici déjà à sa hauteur. Autrefois, quand il est petit, il demandait sans cesse à ce qu'on le porte pour s'asseoir sur cette balustrade pour être au dessus du monde, pour pouvoir l'admirer de toute sa hauteur, mais il ne se sentait jamais plus en sécurité que dans les bras de sa mère.
Et maintenant, les rôles s'inversent.Le fils se hisse sur la balustrade comme autrefois, à cheval, les deux pendent dans le vide, d'un côté dans l'enclos, de l'autre, à l'extérieur tandis qu'il se tourne vers sa mère, observe ses traits tirés, fatigués. Cela lui fend le coeur de la voir ainsi, mais ce n'est plus un enfant, c'est un homme ! Et il doit se montrer fort, pour elle, pour la famille, pour tout ce que cela représente.
« C'est trop calme ici. » dit-il soudainement, avant de croiser le regard de sa mère et de lui offrir ce qu'il espère être, son plus beau sourire.
« Je veux dire, on entend toujours Hermeus qui râle, les hippogriffes qui se battent entre eux lors de la saison des amours, les oiseaux qui vont et viennent dans les nichoirs avant de s'y faire chasser par les botrucs, mais c'est quand même trop calme. » répète Theseus avant avant de passer sa jambe qui était à l'intérieur de l'enclos de l'autre côté et de faire face à sa mère.
« Il manque quelque chose. L'âme de la Tanière. »
Maman.C'est cela même, ce lien que l'on ne peut définir, l'acte de donner la vie qui relie l'enfant à la mère d'une façon unique et qu'on ne peut briser, l'esprit du foyer qui demeure, toujours là pour sécher les pleures, chasser les cauchemars et aider l'enfant insolent à ses heures, innocent la plupart du temps, à s'endormir par ses chants.
Maman.Oui, tout simplement.
« Ta voix, mum. » souffle-t-il avant de tendre la main pour saisir sa main meurtrie, cachée sous un gant pour prendre le temps qu'il faut pour guérir, effleurant du bout des doigts les siens malgré le cuir, chaleur humaine, tendresse du fils envers la mère. « Tes chants et tes berceuses me manquent maman. J'aimerai les entendre à nouveau. »
Une demande qui a l'écho de l'enfance, le fils réclame sa mère car elle lui manque, le coeur meurtri, il cherche à la consoler et à lui montrer simplement quelque chose d'évident, de visible mais que l'on ne voit pas.
Je t'aime.« Je ne suis plus un petit garçon qui a peur que le croque-mitaine se cache sous son lit, maman. Je suis un Scamander et je ne peux, je ne veux pas accepter ce qu'ils t'ont fait. Cela m'est impossible. » il lui serre doucement la main, tout en douceur, sans brutalité, mais dans ses yeux, une flamme brille, danse et le consume déjà. Je refuse d'être tenu à l'écart !
« Je vais t'aider à chanter de nouveau, mais cette fois, nous ne chanterons pas les berceuses de mon enfance, mais des chants de guerre.
Et ensuite, nous les tuerons tous. »
Parce qu'il ne peut en être autrement.
Parce que la flamme danse sur la tombe de ses ennemis.
[ theseus style ]