to build a home (farae)

Lorsque la porte d’entrée s’ouvrit à la volée, presque comme si la maisonnée l’avait attendu toute une épopée, ce ne fut pas seulement la chaleur d’un foyer et la vision d’un oncle aimant qui accueillit Lyrae.
Aspergée d’émotions et de souvenirs était-elle à présent, se remémorant ses péripéties avec Icare, les joutes verbales échangées avec Rickon, un premier baisé innocent échangé avec son cousin alors qu’ils n’étaient que des bambins, avant que ce jeu ne devienne plus espiègle lorsqu’elle lui apprit à séduire les donzelles. Des nuits assis sur ce perron, à refaire le monde avec Icare ou encore, à se faire sermonner par son oncle. Puis, ce fut les réprimandes de Scylla qui vinrent raisonner dans son esprit, tante exaspérée par les deux tempêtes qu’étaient Icare et Lyrae, le duo infernal de la famille.
Tendres souvenirs auxquels elle n’avait plus songé depuis bien trop longtemps, accaparée par ses affaires et plus tard, par ses ennuis. Scènes fugaces qui lui rappelaient qu’en vérité, les moments passés au sein de cette demeure avaient été plus heureux et légers que ceux vécus au manoir familial.
Ces rires, ce bonheur, son innocence et son espièglerie, sans doute les devait-elle à une seule personne : son oncle Faust, qui se tenait en chair et en os face à elle.

Faust, qui avait pansé ses blessures et effacé ses larmes chaque fois que son père l’avait froissé.
Faust, qui la chatouillait jusqu’à qu’elle pleure de rire.
Faust, qui la couvrait avec Icare chaque fois qu’ils ne finissaient pas leurs devoirs, sous le regard réprobateur de Scylla.
Faust, qui avait tout simplement était un second père digne de ce nom.

Une étoile qui brillait incessamment dans le ciel pourtant si noir de Lyrae.

« Lyrae. » Prénom qui résonna dans l’air, consonances douces et nobles à la fois, destiné à la brindille devenue femme mais encore enfant aux yeux de son oncle. Cela, elle pouvait le déceler dans son regard. Inévitable, poignant et agaçant, sentiments ambivalents.
« Laisse-moi donc te regarder. » Pas un seul mot ne franchit les lèvres de la vipère. Cependant, les iris émeraudes parlaient pour elle, s’humidifiant involontairement sans pour autant laisser les larmes se déverser, sensibilité contrôlée. La bouche ne parvenait à s’étirer en un sourire, mais ses yeux, aussi éclatants que des pierres précieuses, souriaient à Faust.
Etreinte timide échangée entre l’oncle et la nièce, qui devint plus forte lorsque cette dernière vint resserrer l’étreinte. Comme il lui avait manqué !

Alors que Lyrae le relâchait avec douceur, l’expression de Faust devint insondable lorsqu’il balaya de nouveau d’un regard observateur le faciès de l’ancienne Auror. Elle comprit alors qu’il avait saisi. Un bout de ce maudit traitor, trahissant une humiliation qu’elle souhaitait garder secrète. Il n’en dit pourtant rien, préférant l’emmener vers la terrasse qui s’ouvrait vers le jardin, sublime espace où ils aimaient tant passer du temps ensemble. « Je t’en prie, rentre. Mettons nous sur la terrasse. » Toutes les discussions qu’elle aurait pu avoir Henry, avaient été échangées ici même avec Faust, durant des années. Avant qu’elle ne s’éloigne, dévorée par l’ambition et son envie de se surpasser.
« Scylla et les garçons se sont absentés, peut-être que tu les croiseras à leur retour. » Excellent, qu’ils ne rentrent pas, je me porterais mieux, pensa-t-elle intérieurement, acerbe. Non pas qu’elle ne souhaitait pas les voir, loin de là. Mais il était préférable qu’elle soit seule avec son oncle. Elle ne souhaitait en aucun cas que sa tante et ses cousins viennent se mêler à tout cela, cherchant à l’influencer, à la caresser dans le sens du poil afin qu’elle reste. Car n’était-ce pas le but de cette entrevue pour Faust ? Elle n’était pas assez idiote pour croire qu’il l’avait innocemment invité. Ses intentions étaient louables mais vaines. « Ils se réjouiront de te voir. » « Très bien, j’espère rester assez longtemps, dans ce cas-là. » lança-t-elle avec une hypocrisie soigneusement dissimulée, alors qu’ils s’installaient autour de la table en bois.

« Tu m’as manqué, gamine. » Gamine. Il pouvait se targuer d’être le seul à pouvoir l’appeler ainsi, elle qui avait toujours insisté pour faire la grande, parfois se donner de grands airs, se parant d’une arrogance éternelle. Sauf que lorsque cela venait de la part de Faust, l’appellation devenait moins vexante, tant l’affection résidait dans son ton. « Et moi donc, mon oncle. » Intonation doucereuse et pleine de sollicitude, sa main venant attraper celle de Faust, la serrant contre la sienne.
Sourires échangés, avant que celui de Lyrae ne se volatilise brutalement, comme si ces amabilités n’avaient été qu’une illusion. « Je suppose que mon père s’est lamenté à mon sujet, n’est-ce pas ? » Sa voix claqua dans l’air, aussi violente et douloureuse qu’un coup de fouet. Bizarrement, elle ressemblait en cet instant précis en tout point à son bourreau. Faciès et expression identique, version féminine d’un père autoritaire, ressemblance troublante et qui déplaisait fréquemment.
« Me faire passer pour la vilaine alors que le Diable vit en lui ? » poursuivit-elle avec mépris, prête à cracher tout le venin qu’elle semblait avoir retenu durant quelques semaines. « Prêt à livrer un duel à mort avec sa propre fille, sans comprendre que l’erreur venait de lui. » Elle éclata d’un rire sans joie, sa cicatrice dissimulée par le maquillage conférant à son visage une expression encore plus figée que celle habituelle.

Macaria brisée par Hadès,
Reine amazone touchée en plein coeur.