Gamin Loup (Cygnus&Antarès)

Y'avait cette histoire à propos d'enfants qui étaient abandonnés dans les forêts, ces gamins qui devenaient sauvages parce que coupé du monde, coupé de toute humanité, mais qui étaient assez forts pour survivre, pour marcher parmi les loups, vus comme leurs pairs. Ce genre d'histoire avait ça de vrai que partout des gamins grandissait sans amour. C'était comme ça dans leur monde, et Antarès le savait, depuis petit, gamin il avait toujours su que les yeux de son père ne brilleraient que de colère, que la mère serait distante, aimante à sa manière, sans trop le montrer. Alors il fallait se débattre et se battre, et lui avait réussi à s'en sortir sans trop de cicatrices, parce que le destin avait été clément, parce qu'il se fondait dans le rang, même s'il en sortait de temps en temps il ne faisait pas assez de vagues pour se faire trop remarquer. Aux yeux du monde il était un soldat digne de son nom, un sorcier digne des siens. Et ce sorcier marchait dans les rues de Godric's Hollow, les yeux balayant les rues pavées, les odeurs de pisse qui se mêlaient aux établis de fleurs qui puaient le printemps. Il ne comprenait pas ce que les Potter trouvaient à ce village paumé, lui avait besoin du bourdonnement constant de son Londres adoré, il avait besoin du bruit, il avait besoin des immeubles et de l'odeur typique de la ville. Et pourtant Antarès y était apparu dans un crac sonore, suivi par un deuxième, son chien à ses pieds, qui suivait sans vraiment se poser de questions. Et les gens saluaient le Black d'un mouvement de tête ou d'un regard, quand d'autres se cachaient ou le fuyaient du regard, par peur du nom, comme si le nom lui même avait un pouvoir. La langue de Plomb y était habitué après tout, il venait souvent pour voir sa belle, pour sentir sa présence, son odeur, pour s'enivrer de sa voix, parce qu'il ne pouvait pas rester loin trop longtemps, c'était débile ce que ressentait le gamin quand il la voyait. Mais dans la grande demeure des Potter il n'y avait pas qu'elle que le Black allait visiter, y'avait cet autre enfant perdu, celui qui ressemblait trop à un frère sans en être un, celui pour qui le cœur de Antarès pleurait en silence. Ce gamin qui lui semblait être le punching ball du destin, et le punching ball des Potter au vu des bleus sur sa peau fragile et pâle de ne voir le soleil qu'à travers des fenêtres ou des rideaux trop épais. Ou pire encore, de ne pas le voir du tout enfermé dans cette cave dont l'odeur de moisi se mêlait à l'odeur de la peur et des larmes, d'un gamin recroquevillé. Et la gorge de la Langue de Plomb était serrée, un caillot comme à chaque fois qu'il arrivait devant la porte imposante, la peur d'entrer et de voir que le gamin avait disparu, qu'il était parti dans un monde plus clément. Il s'était imaginé trop souvent apporter la nouvelle à Augustus, il ne comprenait pas vraiment le lien entre les deux garçons, il savait juste que leur amitié était forte, trop forte à son goût, trop forte pour être saine, ce genre d'amitié qui finirait par les briser, qui finirait par les détruire et les brûler. Il s'était imaginé dire à Augustus que le Cygne s'était envolé, que sa constellation brillait là haut dans la voie lactée, qu'Augustus pouvait lever les yeux et le regarder, mais qu'il ne pourrait plus jamais lui parler, le voir ou l'approcher sans se brûler. Le Black prenait une profonde inspiration, alors qu'il sentait derrière lui Freyr s'agiter, sans doute craignant de croiser Astoria, ce qui arrachait un sourire au jeune homme « Ne t'inquiètes pas, on ne va pas voir Astoria aujourd'hui » Elle n'était probablement pas là sa belle. Il tapait un coup sec sur la porte qui s'ouvrait presque aussitôt sur un serviteur courbant l'échine à la vue du sorcier. Ce dernier n'y prit pas gare et s'avançait silencieusement dans le dédale qu'il connaissait par coeur. Ses pas le conduisirent presque instinctivement vers la cave de laquelle il entendait déjà les sanglots, sa baguette glissait dans ses doigts Alohomora, le bruit trop familier du loquet qui s'ouvrait, et de la porte qui grinçait, s'ouvrant sur cette odeur reconnaissable entre mille, qui fit grimacer Antarès. Il s'avançait dans l'obscurité. Freyr se chargeait d'éclairer doucement la pièce, avant de se mettre dans un coin, comme un meuble, sans bouger ou faire de vagues. Antarès s'approchait du gamin recroquevillé dans un coin, il avait l'air encore plus jeune comme ça, chétif, fragile, le Black s'accroupissait à sa hauteur. « Qu'est-ce que tu as encore fait Cygnus ? » Il avait beau essayer de le résonner, de lui faire comprendre qu'il ne devait plus se rebeller, qu'il devait accepter les ordres de son patriarche sans rechigner, rien n'y faisait, alors il se contentait de relever le visage meurtri par les larmes, il glissait ses doigts sur les lèvres sèches et déchirées. Il sortait une gourde qu'il tendait au prisonnier, le laissant reprendre son souffle et soulager sa gorge qui devait être trop sèche pour pouvoir parler. « Ca va aller d’accord...je suis là maintenant... » les mots d’un frère dont le coeur saignait, mais qui ne pouvait finalement rien y faire, qui ne pouvait changer les choses d’un claquement de doigts, qui ne pouvait qu’apporter un peu de réconfort. Quelques fois, quelques nuits, quelques jours. « Les établis dans la rue sont pleins de fleur, l’odeur est tellement forte, elle t’en tournerait la tête » Sourire léger, qui se veut sincère, qui se veut rassurant, qui se veut fraternel.

Encore une fois, Cygnus avait mis son père en colère, à se rebeller et dire qu'un jour, il réussirait à s'échapper de cette maison. Des mots d'ancien Gryffondor qui le mettait en danger. Cygnus ne voulait pas être comme les autres Potter et il tournait en rond comme un lion en cage au manoir. Son père n'avait rien dit, il ne l'avait même pas menacé de l'envoyer au sous sol. Cygnus remonta aussitôt dans sa chambre, comme s'il croyait que tout allait s'arranger. Mais non, c'était mal connaître Henry Potter. Il avait attendu. Puis il avait traîné Cygnus jusqu'à la cave. La suite? Il ne valait mieux pas en parler, il restait dans un coin prostré, ressentant les doloris jusqu'à la point de ses pieds. Fourbe, le paternel, il n'avait pas eu le temps d'essayer d'écrire à Faust, pour lui demander de l'aide. Le noir qui le terrorisait l'apaisait désormais. Le silence le rassurait sur le fait qu'on ne viendrait plus le torturer pour le moment. Il tentait de s'en remettre, d'essayait d'être plus fort que ça et il savait qu'il pouvait y arriver. Il n'était pas allé à Gryffondor pour rien, à Poudlard. Il n'avait envie de rien, Cygnus, à part fermer les yeux et laisser les larmes couler toute seule. Il n'avait plus peur, et il arriverait à se calmer. Avec le temps. Cygnus était devenu la paria des Potter parce qu'un maudit Choixpeau l'avait envoyé dans une autre maison que Serpentard. Mais ce n'était pas sa faute. Et il le payait très cher encore aujourd'hui.

Et puis le temps sécha les larmes du jeune Potter et il entendit des bruits de pas. Une porte qui s'ouvrit et le coeur de Cygnus qui s'emballait de revoir son père revenir pour recommencer les sorts. Il reconnut la silhouette d'Antarès, le frère d'Augustus. Cygnus se blottit contre lui, comme pour se rassurer. Il lui demandait ce qu'il avait fait pour se retrouver là et la voix tremblante de Cygnus répondit: " Je lui ai dit que j'allais réussir à m'enfuir d'ici un jour et que je ne reviendrais plus..." Antarès lui donna de l'eau, de quoi boire un peu. C'était vrai qu'il avait soif Cygnus, à force d'hurler. Il était là comme un grand frère pour le réconforter et Cygnus en avait besoin pour ne pas devenir fou. Parce qu'il allait devenir fou à force de rester enfermé, à relire ses vieux manuels de l'école, à se faire oublier des Potter. Il l'écouta décrire l'extérieur qui faisait rêver le jeune Potter et il reprit: "Fais moi sortir d'ici Antarès... je vais devenir fou..."

Il le tenait dans ses bras le gamin meurtri, l’enfant chétif, il le tenait contre lui, celui qui avait besoin de sa présence. Et pourtant il restait distant, son cœur restait fermé, parce qu’il ne pouvait rien faire, à part être là, à part essayer de lui faire croire que demain serait différent, que le soleil se lèverait sur un jour nouveau. Mais ce serait mentir que de dire que tout irait bien et Cygnus était trop malin pour croire en ce genre de mensonge, ou trop résigné. Et pourtant il continuait de se rebeller, c’était une force de caractère qu’Antarès pourrait admirer, si elle ne résultait pas à chaque fois en de nouveaux bleus sur ses bras. Parfois il se demandait pourquoi il faisait ça, pourquoi il ne laissait pas la porte de la cave fermée, n’attendait pas sagement Astoria dans le salon ou devant le manoir. Pourquoi est-ce qu’il ne pouvait pas oublier ce gamin terrorisé qui hantait les couloirs de la bâtisse. Et puis il se rappelait de son propre frère, qu’après tout ça pourrait être Augustus dans cette cave, et qu’il ne le supporterait pas. Il caressait doucement les cheveux du Potter, comme s’il ne voulait pas le blesser plus encore, comme si les caresse d’un étranger pouvaient faire oublier les coups du paternel. Et la demande tombait, il voulait sortir le gamin, il voulait probablement respirer un peu d’air pur.
« Pourquoi faire ? Pour revenir t’enfermer avant que ton père, tes sœurs, ou ton frère ne rentre ? » La voix de l’aîné était sèche, dure, elle tranchait, parcequ’il avait beau vouloir aider Cygnus, il marchait sur des coquilles d’oeuf dans cette situation, il ne pouvait risquer de la perdre pour que le gamin respire un peu d’air frais. Alors il attrapait le menton du plus jeune entre ses deux doigts « Tu sais que je n’aime pas te voir dans cet état, mais tu ne fais rien pour que ça s’arrange Cygnus...et je ne serai pas toujours là ! » Et pourtant il croisait le regard de Freyr, sachant que son serviteur avait dans sa poche la clé de la liberté du gamin.