brings out the worst

the sky is on fire, the dead are heaped across the land

Bourrasque infernale, strident cri qui accable, l'amante suppliciée serre des poings, mâchoire manque de s'ébrécher sous la pression exercée. C'est qu'on lui a vanté les gaietés de la maternité, pas de l'étape inéluctable où elle n'a que l'écœurante et surtout douloureuse impression de s'ouvrir en deux. Le bulgare s'échappe d'entre les lippes quand elles ne sont pas malmenées, mordues jusqu'à ce que grenat s'écoule sur le menton. Tout ce supplice pour faire naître le chiard qui n'a eu de cesse de quémander son froussard de père.

Malyen, Mal. Née Vulchanova. Père inconnu, mère bulgare. Mordoré matronyme autocrate. Filiation de femmes qui se sont inventées, érigées, charpentées de leurs mouvements arachnéens et de leur esprit méticuleux. Nom porté par une sorcière notable, reconnue, Nerida Vulchanova, fondatrice de Durmstrang dont l'évocation de la mort encore aujourd'hui fait grincer des dents. Aujourd'hui, le nom se fait entendre comme des entrepreneurs bienfaiteurs : groupe magico-pharmaceutique, chercheurs aux remèdes novateurs, empire façonné des mains d'une seule ambitieuse motivée par l'opulence toujours insatisfaisante, et d'un crédule bon samaritain. Fins stratèges financiers, capitalistes de prime abord plus qu'anges gardiens, détermination damnée par illégalité et crimes. Autorités aux trousses, s'enfuient avec la fortune amassée, sans oublier les bambins dans la foulée.

1886, Grande-Bretagne, berceau d'un renouveau. Mains sales le resteront à jamais. Corruption, chantage, marché des poudres magiques illicites qui font le gagne-pain et nourrissent l'abondance qui fait pâlir même les plus prospères. Réputation écorchée sous les yeux d'autres, envieux, tandis que Dara et Pavel se concentrent sur l'éducation de ce(ux) qu'ils lègueront plus tard au monde. Qu'importe les esclandres répétés et déblatérés par les convoiteux, construisent leur cocon dans le simple et unique but que leurs enfants ne manquent de rien, aujourd'hui, comme bien plus tard.

malyen, malyen, malyen à la moue contemplative, gavroche songeuse aux préoccupations qui ne sont pas de son âge. Plumette tournoie autour des phalanges, grattent sur parchemins qui ne restent vierge que trop peu de temps, griffonés d'idées et d'affabulations, notes prises comme elles viennent : indéchiffrables et énigmatiques dès la deuxième relecture. Semelles tapotent aux parterres des salles de classe et d'une bibliothèque généralement plongée dans le mutisme. Bouquins s'écrasent sur le bois de la table, craquèlent les pieds de cette dernière dont on se demande comment elle supporte encore le poids du savoir qu'elle leur inflige. Fin d'après-midi amène les ouvrages à retrouver leur place initiale dans les étagères surannées, l'heure n'est plus à la paperasse mais aux sorts dans lesquels elle s'ordonne d'exceller. Aînés débonnaires et disposés, doués là où elle manque de régularité et d'expérience, lui apprennent les charmes qu'elle n'est pas censée connaître. Maléfices sortent de l'embout de la baguette dès les mots chuchotés. Puis sans qu'ils ne le soient. Et sans baguette pour les sortilèges les plus faciles, dès la fin de sa septième année. Ne remerciera jamais assez ceux qui lui ont permis d'avancer dans un parcours qu'elle ne pensait pas lui être destinée.

Duelliste professionnelle qui ne s'est pas construite seule. Harold, pilier dès la scolarité, puis après. Là quand tout allait pour le mieux, et quand tout allait mal. Mais pas quand tout allait vraiment mal. Pas quand, entêtée, elle avait cru qu'ils étaient invincibles. Qu'il était intouchable, leur descendance aujourd'hui dépouille enterrée à peine reconnaissable. Jamais né, pas de première bouffée d'air, pas de premier geignement, pas de premier sanglot et de premières larmes à balayer d'un pouce caressant la membrane porcelaine, pommettes rosées et joufflues qu'elle avait imaginé. Carrière et renommée avant l'enfant dont elle ne connaissait rien et dont elle ne se doutait pas qu'elle n'allait jamais rien n'en connaître. Regrets, regrets, regrets, remords scélérats et meurtriers ont assassiné le cœur autrefois bon vivant. Ou ne serait-ce pas le regard dégoûté, amer et impitoyable de son époux qui lui ont asséné le dernier coup ? Fissure, fracture affective, sentiments tourments, désolation de ce qu'ils sont devenus, déni. Simulacres, imposture de leur relation dépeinte dans un idéal qu'ils n'arrivent pas à atteindre. Trahisons, parjures volages, Malyen bernée, déshonorée, désastreuses représailles, vendetta infructueuse. Pourtant encore à ses côtés, soutien omniprésent, l'épaule sur laquelle il peut se reposer.

Vulchanov s'éloignent. Dana, Pavel, Asen. Autrefois liés comme les deux doigts de la main, frère avec qui l'entente n'avait pas besoin d'être nourrie d'artifices. Aujourd'hui mensonges et hypocrisies voilées dans des sourires qui ne veulent néanmoins que du bien. S'aiment, fratrie soudée mais qui ne comprend plus la partie adverse. Malyen arrachée de ses origines, trop Skeeter aux yeux d'Asen qui réprouve les valeurs et adhésions qu'elle arbore. La récupérer, refus de ce qu'elle est devenue et de ce qu'ils font d'elle.

Journal dont les pages tournent les unes après les autres, pupilles scrutatrices qui lisent chaque phrase avec une attention toute particulière. Titres racoleurs et faits racontés dans une démesure considérée et savourée par la majorité des lecteurs, nouvelle édition parue comme tous les matins et qui a pris une place toute particulière dans le bon commencement de la journée. La tasse de café noir qui ne fait qu'un avec sa paume, elle en prend une gorgée dans un silence distingué et inhabituel. C'est que ce n'est pas même naturel pour elle d'être si réservée. Parle. Regard appuyé, nullement le besoin de relever le menton pour sentir les mirettes qui la dévisagent, traits blasés. Inspiration forcée, soupir téméraire. Je n'ai rien à dire. Tasse qu'elle pose sur le bord de la table sans même croiser l'oeillade criminelle qui décèle le mensonge exhibé. Il se frotte les tempes, serre la mâchoire, prend un temps pour faire attention à l'impact des pensées qu'il souhaite déclarer. Se retient, mais pas trop. Le don de gâcher les journées à peine commencées, sifflé sans douceur aucune. Les épaules se haussent, façade carapace, le sourire agaçant dégainé comme bouclier qu'elle croit blindé.

- Mieux que celui de répandre l'écœurant parfum de l'autre poissarde de mégère sur mes draps.
- Nos draps.

Pose finalement ses yeux sur la face qui la toise, sourcils se froncent et laissent apparaître les ridules sur le front. N'fais pas ça, ça t'enlaidit, il a le sourire tout plein de dédain et la posture de celui qu'on ne peut pas faire flancher. Plus tu les fronces, plus les entailles s'inscrivent sur ton visage même quand il reste étrangement et faussement indifférent. S'approche, deux pas suffisent pour l'atteindre alors qu'elle reste à sa place, tentative de rester droite. T'étonne pas du fait que je préfère l'autre poissarde de mégère, elle, elle reste belle. Sûrement parce que l'égoïsme n'l'a pas rongé comme il l'a fait avec toi. Les mots sont coincés dans le fond de la gorge. L'insulter, l'accabler par tout ce qu'elle ressent à cet instant quand bien même il ne ferait que feindre le désintérêt. Malyen, elle n'a pas besoin de parler. Putain de sortilège informulé qu'elle peut lui lancer sans même desceller les lèvres nouées, quand bien même l'impact sera beaucoup moins puissant que si elle faisait tournoyer la baguette entre les phalanges qu'elle recroqueville dans sa paume, poing serré. N'ose pourtant pas. Peur de ne pas pouvoir revenir en arrière si elle pousse les choses trop loin. Si elle outrepasse une ligne pas si claire à laquelle il l'abandonnera sans la rejoindre de l'autre côté. Préfère prendre son manteau sans dire ne serait-ce qu'un mot, l'enfiler et passer le pas de la porte sans la claquer.

Se vider la tête, se rendre à l'atelier à quelques pas de chez elle. Ensorceleuse de métaux (et d'objets en général) qui a amassé les babioles et bricoles, parfois trouvées d'elle-même et d'autres fois apportées par des hommes et des femmes dont on taira les identités. Objets charmés, parfois inoffensifs d'autres fois plus délicats à manier. Intérêt tout particulier pour ces derniers dont les secrets sont souvent difficiles à déceler. Objets banals sans propriétés quelconques qu'on lui amène pour les enchanter, que ce soit pour faciliter les tâches ménagères ou les corvées qu'on n'a pas envie de faire lorsque le temps nous manque, que ce soit pour amener un aspect pratique ou novateur. Ou pour faire du mal.