Under the skin (Astormac) - février 1914

La soirée s'abattait contre les murs de l'établissement de soins du monde britannique sorcier. Du moins, c'est ce que le Gaunt espérait. De ce qu'il en savait, niché dans son cachot au sous-sol, il n'avait pas vraiment vue sur l'ensoleillement extérieur. Certains et certaines de ses collègues avaient opté pour des fenêtres magiques, mais de l'avis du jeune sorcier, ce n'était qu'une fioriture, une ineptie pour les simples d'esprit. S'il voulait savoir le temps qu'il faisait dehors, et pour les sept prochains jours, il n'avait qu'à lire la Gazette, comme tout le monde. Son ambiance feutrée et calfeutrée lui plaisait, tout autant qu'à sa couleuvre de compagnie. Alexander, cependant, ne répondait pas aussi présent qu'à l'accoutumée, étant en période de mue, et il ne quittait qu'à peine son tiroir, depuis ces derniers jours. Grand bien lui fasse, Cormac, lui, était libre de sortir d'ici, de vaquer à ses occupations et de mener sa vie telle qu'il l'entendait. Et ce soir, plus qu’à l’accoutumée, il attendait la chute de l’astre solaire avec une certaine impatience. Pas pour une potion particulière qui nécessite qu’elle soit concoctée de nuit, ou à une certaine phase de la Lune. Pour ça, il y avait l’équipe de nuit, pour commencer, mais de toute façon ce n’était pas le sujet. Son entrain et sa joie n’étaient pas professionnels, mais plutôt personnel. C’était quelque chose qui l’extrayait de sa situation de Gaunt, de sorcier d’une famille à l’histoire aussi caustique que poussiéreuse, aux idées et aux idéaux discutés par l’ensemble des familles de sang-purs du pays. Les autres en parlaient sans doute aussi, mais il n’y avait pas vraiment matière à en parler. La pureté importait davantage que l’intérêt qu’on pouvait porter à ces sorciers de sang à l’origine boueuse. Mais au diable ces préoccupations, ces démons qui hantaient les bas-fonds de la société sorcière. Ce soir, Cormac avait rendez-vous.

Finissant ce qu’il faisait, annotant son carnet et son tableau noir de quelques indications, quelques mesures, quelques commandes et ce qu’il aurait besoin de suivre pour les prochains jours, Cormac remarqua qu’il semblait danser sur ses pieds, ce qui l'étonna. Ce n’était pas son genre, d’être impatient, en mouvement. Même s’il avait été à Serdaigle, il n’en demeurait pas moins un héritier de Serpentard, et il était presque naturel pour lui, et le reste de sa famille, d’avoir une certaine langueur et lascivité. Attendre son heure, attendre le bon moment, c’était dans les gênes de la famille. Après, Cormac tendait à penser que sa famille attendait plus qu’elle ne saisissait d’opportunité. À trop tarder, un serpent restait le ventre vide. Un peu comme le fameux basilic de la Chambre des Secrets. Grand secret de la famille, celui-ci, au cœur des nombreux Gaunt au fil des ans, n’avait pas daigné émerger d son antre et restait tapis, assoupi, attendant le jour où l’un d’entre eux aurait assez de cran pour utiliser sa puissance. Et ce jour, très assurément, n’était pas arrivé. Et peut-être n’arriverait-il jamais, d’ailleurs. Mais Cormac n’était pas de ces chiffes-molles, même s’il en faisait partie. Lui, il était de ceux qui prenait sa vie entre ses mains et sortait au grand soir.

Bouclant son atelier, rajustant son col, il amenât sa commande pour la prochaine journée de travail au guichet de l’apothicaire, avant de s'éclipser par les escaliers, arrivant dans le grand hall. C’était la fin des roulements des équipes, et le service de nuit allait prendre son poste tandis que les médicomages de la journée prenaient leurs quartiers. En bas de l’escalier, son manteau sur le bras, dans un ensemble assez classique mais propre, bien sur lui, Cormac attendait. Autour de lui circulait les sorciers et sorcières indifférents à sa présence, tout à leurs occupations du soir, leurs lubies et leurs envies. La soirée était dédiée à la fête, aux retrouvailles avec son plus proche, son être spécial. Tous cancanaient sur le sujet, mais lui attendait. Ce soir, il n’avait pas de douce et tendre à la robe fleurie et légère comme les pétales d’un lys des marais. Ce soir, il voyait son cousin, un Black. Son cousin germain, même. Le gryffondor qui était à son image l’exception à la règle dans leurs familles respectives. Tandis que Cormac était celui qui avait rejoint la maison de bronze et de cyan, son cousin, du même âge, avait rejoint la maison d’or et de vermeil. Le voyant soudainement apparaître en haut des escaliers, Cormac chassât son léger sourire de son visage. Il se devait au moins de rester digne, même si rester immobile avait été un effort presque insoutenable. Alors qu’Asteri arrivât en bas des escaliers, il ne résista cependant pas à le rejoindre, alors même qu’il n’avait pas posé le pied sur le pallier.

« - Bonsoir Asteri, tu as passé une bonne journée ? »

Il n'osait pas pleinement le regarder dans les yeux, lui serrer la main. Pas encore. Pas ici. Pas devant tout le monde. Il allait devoir attendre, attendre encore et encore, tapis dans l’ombre. Et ne peut-être jamais se détendre.